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Montréal, 16 août 2003 / No 127 |
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par
André Dorais
Si l'on en juge d'après ce qu'en disent les médias et économistes populaires, la déflation est à éviter coûte que coûte. Pourtant, on constate en survolant les quatre façons dont le terme est utilisé qu'une seule est à éviter, et cela ne requiert de la banque centrale qu'une chose: cesser de créer de l'inflation. Voilà le problème, car demander à la banque centrale de réfréner ses penchants inflationnistes pour éviter la déflation bien comprise, c'est l'équivalent de lui demander de cesser ses activités... Il va sans dire que d'une part les banquiers qui en profitent et d'autre part les fonctionnaires et politiciens qui s'en occupent n'envisagent pas cette suggestion d'un bon oeil. Il est dans leur intérêt de nous garder dans l'ignorance. Jugez par vous-mêmes. |
La
déflation par la croissance
Selon la conception populaire qui est régulièrement utilisée dans les médias, la déflation constitue une baisse générale des prix des biens et services. Si tel est le cas, pourquoi alors s'apeurer lorsqu'on peut se procurer un ordinateur à un millième du prix d'il y a trente ans, et cela à cause des prodigieux gains de productivité engendrés dans cette industrie? N'est-ce pas plutôt une bonne affaire? Les fabricants sont contents car ils continuent à engranger les profits malgré la baisse des prix et les chercheurs d'emplois sont comblés. Il suffit de comptabiliser les formations les plus en demande lors des trente dernières années pour se rendre compte que celles reliées aux technologies de l'information en faisaient partie. Dans un marché libre des interventions gouvernementales, ce sont tous les biens et services qui présenteraient des prix à la baisse, et cela nous permettrait de tous nous enrichir. Poursuivons notre enquête. La déflation par l'épargne Il y a également baisse des prix lorsque les gens consomment moins dans le but d'épargner. Pour dire autrement, une épargne forte augmente la valeur de la monnaie, chaque unité monétaire permettant ainsi d'acheter davantage de biens et services. Qu'y a-t-il donc de mal à ce que les gens épargnent? C'est que, dans l'esprit keynésien tordu de nos dirigeants, cela empêcherait le PIB d'augmenter. Les prix à la baisse leur font peur, alors ils réduisent les taux d'intérêt et font rouler la planche à billets pour être sûrs que les prix repartent à la hausse. Qu'il s'agisse d'hypocrisie ou d'ignorance, cela n'en demeure pas moins une fraude.
Ainsi, que l'on parle de déflation par les gains de productivité ou de déflation par l'épargne, les deux sont le résultat d'actions volontaires. Une action volontaire est nécessairement désirable pour celui ou celle qui l'engage, mais pour celui qui veut contrôler notre vie ou tirer profit de notre ignorance, ce ne l'est pas autant. Notons que dans ces deux situations il serait préférable de parler simplement d'une baisse des prix et de laisser tomber le terme déflation. Poursuivons. La déflation par l'offre, c'est-à-dire par crédit bancaire ou par confiscation À proprement parler, c'est uniquement lorsqu'on se réfère à l'offre de monnaie qu'on devrait évoquer l'inflation ou la déflation. La déflation n'est possible que s'il y a eu d'abord de l'inflation. L'inflation est une augmentation du stock de monnaie alors que la déflation en est une réduction. La déflation ainsi définie conduit le plus souvent en une baisse des prix, bien que d'autres facteurs soient à considérer. Il en existe deux types. La déflation par le crédit bancaire Lors d'une crise bancaire, de plus en plus fréquente depuis l'abandon de l'or comme ancrage de la monnaie, les déposants se précipitent à leurs banques afin d'en retirer leur argent. L'Argentine a vécu cette situation pour la deuxième fois en dix ans. Ce genre de crise survient lorsque les gens perdent confiance en la capacité de leurs banques à leur remettre leur fric. Celles-ci en sont incapables, car elles sont encouragées par le gouvernement à en prêter davantage qu'elles en possèdent, selon le système dit des réserves fractionnaires. À une époque pas trop lointaine, les banques qui se faisaient ainsi prendre la main dans le sac étaient liquidées sur le champ. Aujourd'hui, nos dirigeants sociaux-démocrates n'ayant que compassion pour leur prochain, ils les protègent de la faillite... en nous taxant! C'est qu'ils sont complices, voire les principaux responsables de ces débâcles. La contraction monétaire qui résulte d'une telle crise est importante, mais a pour résultat d'accroître la valeur de chaque unité (chaque dollar) qu'il reste. Qui dit augmentation de la valeur de la monnaie, dit baisse générale des prix. La déflation par le crédit n'est que le visage apparent du mal qu'est l'inflation par le système des réserves fractionnaires. Elle doit même être considérée comme un bien dans les circonstances, car elle est initiée par les déposants qui réalisent qu'il vaut mieux faire autre chose de son argent que de le laisser dans un système frauduleux. Elle agit comme un traitement pour se soulager de l'inflation et cela d'autant plus vite qu'elle est libre des interventions gouvernementales. La déflation comme confiscation Les politiciens étant des professionnels de l'intervention il leur est difficile de ne rien faire. Lorsqu'ils jugent que la déflation par le crédit risque de réduire le stock de monnaie à zéro, ils restreignent notre capacité à retirer et à transférer notre argent de nos comptes bancaires. Cela réduit la masse monétaire davantage et augmente la valeur de la monnaie en autant que les fonctionnaires ne se remettent pas à imprimer de nouveaux billets, ce qui est souvent le cas malheureusement. La confiance des gens envers leur monnaie est ébranlée à tel point que, s'ils n'en sont pas empêchés, ils l'échangent. Le troc prend de l'ampleur tandis que l'échange monétaire se fait plus rare. Il y a appauvrissement général. Seule cette déflation est à éviter, car il s'agit ni plus ni moins d'une confiscation par-dessus la confiscation inflationniste. Or, c'est tout le contraire que l'on entend à son propos dans les médias populaires ici comme en Argentine: ils qualifient au contraire ces restrictions de nécessaires En somme, des quatre façons de voir la déflation, une seule est vraiment indésirable. Pourtant, les médias et économistes populaires font tout pour l'éviter dans la majorité des cas et vont même jusqu'à l'encenser dans le seul cas où elle est désastreuse! On devrait s'y référer seulement lorsqu'on fait allusion au gouvernement, car elle provient de l'inflation dont il est seul responsable. La seule façon de l'éviter est d'abolir le monopole étatique de la monnaie et de la privatiser.
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