Un mémoire présenté au Sommet sur
l’enseignement supérieur |
Madame, Monsieur,
Je désire prendre parole sur la tribune qui m'est offerte afin
d'exprimer mon opinion sur le système d'éducation, que j'ai longuement
fréquenté.
Pour commencer, je conteste fortement l'affirmation
du site Internet
du Sommet affirmant que le Québec a vécu une «crise sociale», que
certains appellent également « printemps érable ». Ce qui c'est passé au
printemps 2012 était certes une crise, mais elle n'a rien à voir avec
une crise de société, si tant est qu’une telle chose est possible, ni
avec le mouvement d'apparente libération qui se déroulait en même temps
dans plusieurs pays arabes. Ce qui c'est passé, c'est plutôt
l'aboutissement d'une culture du tout-m'est-dû.
En effet, depuis plus de 50 ans, les politiciens québécois ont entretenu
cette culture en créant toujours plus de programmes coûteux et
inefficaces, dont plusieurs dans l'éducation. Avec le temps, ces
programmes sont vite devenus des vaches sacrées auxquelles on ne peut
plus toucher. Résultat: la moindre tentative de réforme s'oppose à une
farouche opposition des gens qui en profitent. Et plus longtemps on
garde le statu quo, pire sera la réaction.
Aussi, ce mouvement n'a absolument rien en commun avec le printemps
arabe. Dans ces pays, du moins au début des protestations, on se battait
contre l'oppression du gouvernement et on demandait plus de liberté. Le
« printemps érable » était exactement le contraire: on demandait plus
d'oppression et moins de liberté en exigeant la « gratuité » scolaire ou,
à tout le moins, le gel des frais de scolarité ainsi que le maintien de
l'offre bonifiée des prêts et bourses.
Cette situation est intenable à long terme. Déjà aux États-Unis, le
système de prêts et bourses est en train de devenir
la prochaine bulle, qui pourrait éclater à tout moment et déprimer
encore plus l'économie. Cette bulle, comme toutes les autres, a été
créée par le gouvernement, qui modifie le comportement des gens avec ses
politiques. En effet, en prêtant de l'argent aux gens sans intérêt
pendant une certaine période, on les incite à aller à l'université.
Résultat: plusieurs qui, normalement, n'y seraient pas allés y vont, ce
qui alourdit le système. Les prêts, mais aussi les modestes frais de
scolarité, augmentent artificiellement la demande pour chaque item, et
donc les prix. Comme pour la bulle immobilière qui a éclaté en 2008, la
bulle scolaire ne peut durer éternellement ainsi.
Certes, un doctorat rapporte plus qu'une maitrise ou un baccalauréat...
si l'on trouve le bon emploi. Avec une éducation à si bas prix,
plusieurs sont tentés d'étudier dans des domaines aux débouchés plutôt
limités comme la sociologie, le théâtre et la philosophie. Ne me
méprenez pas; je n'ai aucune objection à ce que quelqu'un étudie dans ce
domaine. Cependant, il doit être conscient que ses opportunités d'emploi
dans son domaine seront très limitées – si jamais elles existent. Et
comme plusieurs seront dans sa situation, la loi de l'offre jouera
grandement contre eux quand ils négocieront leur salaire. Ils devraient
donc y penser à deux fois avant de s'endetter pour leurs études.
|
« Bien que [ce mémoire] aille
à contre-courant de ce que Québec propose depuis 50 ans, les
solutions qu'il apporte sont nettement plus viables. En
effet, laisser le marché affecter les ressources – laisser
tous les résidants du Québec décider par leurs actions ou
non-actions ce qui est préférable – est toujours la
meilleure solution à un problème. » |
Des solutions viables
Après avoir exposé les principaux problèmes de l'éducation
postsecondaire, permettez-moi de proposer des solutions concrètes,
viables et à long terme, tirées du
Manifeste des pas-de-carré.
Donc, les pas-de-carré proposent:
- L'abolition complète
du ministère de l'Éducation et le congédiement de tous ses
fonctionnaires (qui seront naturellement compensés s'ils sont à
contrat).
- L'abolition du
programme des prêts et bourses. Qu'on cesse de privatiser les gains
et nationaliser les pertes.
- L'abolition du REÉÉ.
On n'a pas besoin d'un autre programme d'épargne; si une personne
veut étudier/veut que ses enfants étudient, l'épargne ordinaire
suffit.
- L'abolition de toute
forme de subvention à l'éducation à tous les niveaux, du primaire à
l'université. Si l'éducation est si « payante », alors la dépense sera
vue comme un investissement et se fera sans arrière-pensée.
- L'abolition de l'âge
obligatoire pour les études. Ainsi, les personnes « pas faites » pour
étudier pourront intégrer le marché du travail quand bon leur semble
et selon les exigences des employeurs. Naturellement, rien ne les
empêche de revenir plus tard si elles veulent améliorer leur
situation.
- L'abolition de la
syndicalisation obligatoire des enseignants, de leur sécurité
d'emploi automatique et de leur ancienneté en béton. Désormais, la
compétence primera avant tout, et l'État ne dictera pas ce qu'un
enseignant peut ou ne peut pas
donner comme note.
- L'abolition des
commissions scolaires. Ces monstres bureaucratiques ont plus leurs
intérêts à coeur
que ceux des élèves. Si des gens veulent regrouper certaines
écoles pour mieux gérer les ressources, grand bien leur en fasse.
Oui, ces demandes sont radicales. Oui, ces demandes vont causer des
perturbations à court terme, et certaines personnes risquent de souffrir
beaucoup; certains n'iront peut-être même plus à l'université. Mais
malheureusement, le statu quo est inacceptable. Plus on attend
pour faire les réformes, comme ce fut le cas du dégel soudain des frais
de scolarité, plus elles seront douloureuses.
Je vous remercie de l'attention que vous avez portée à mon mémoire. Bien
qu'il aille à contre-courant de ce que Québec propose depuis 50 ans, les
solutions qu'il apporte sont nettement plus viables. En effet, laisser
le marché affecter les ressources – laisser tous les résidants du Québec
décider par leurs actions ou non-actions ce qui est préférable – est
toujours la meilleure solution à un problème. Ainsi, les ressources
seraient utilisées de façon optimale et l'innovation améliorerait
constamment la productivité. Dans le cas de l'éducation, la concurrence
permettrait d'améliorer la qualité de l'enseignement, la gouvernance et
même le prestige des institutions universitaires.
Au contraire, quand la décision est laissée au gouvernement, on
privilégie le statu quo et on tue l'innovation. Il ne peut en
être autrement: comme la bureaucratie ne fonctionne pas sur la base de
la recherche du profit, elle ne peut fonctionner que selon des règles
précises et dans le cadre de contraintes budgétaires déterminées pour
des raisons politiques. Les solutions pour l'éducation se trouvent à
l'école et au niveau de la rue, pas au Complexe G à Québec. |
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auteur |
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Première
représentation écrite du mot « liberté » en Mésopotamie,
environ 2300 av. J.-C. |
Le Québécois Libre
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