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Je suis tombée l'autre jour sur le petit bouquin écrit par Éric Bédard, Le Pont entre les générations*. Le groupe de recherche du même nom, officieusement basé à l'Université de Montréal, rassemble toutes sortes de monde: Leur démarche est assez rafraîchissante et surtout bien documentée. C'est écrit dans un français respectable et le format – 150 pages – est plutôt agréable. Jusqu'ici, ça baigne. Leur principale préoccupation: la désastreuse cassure entre les générations et la tendance haïssable des décideurs à favoriser le présent contre l'avenir. En d'autres termes, ils s'inquiètent de ce que 1) les plus jeunes soient sous-représentés dans les milieux de travail ainsi que là où les décisions se prennent; et 2) qu'on ignore sans considération les aînés, en les envoyant trop tôt à la retraite, gaspillant ainsi bêtement ce réservoir d'expériences et de connaissances. L'idée est bonne, excellente même. J'embarque. C'est vrai qu'on devrait pouvoir se parler et collaborer entre groupes d'âge, au lieu de s'isoler chacun de notre côté en maugréant contre les baby-boomers à-qui-on-reproche-toujours-tout. Le disque, il commence à être usé; et rien ne permet de penser qu'accuser systématiquement la même gang puisse donner des résultats satisfaisants. Alors, on fait quoi? Qu'avez-vous à nous proposer? C'est ici qu'ils me perdent. Ce qu'ils trouvent à dénoncer, ce sont Pensez-y deux minutes, et dites-moi ce qu'il y a de commun entre ces Ben oui! On parle du plus gros employeur – encore et toujours lui – l'État. On n'en sort pas; le monde tourne autour de lui. Et tandis qu'on y est, on remâche un peu la même vieille gomme du déficit zéro et de l'assainissement des finances publiques qui, bien que nécessaires, nous cassent un peu les pieds. Une solution un peu vague On joue au passage une petite toune sur les clauses orphelin ainsi que sur la mauvaise vision des employeurs qui leur fait prendre les Whôôaa, c'est que ça se dégonfle vite, l'enthousiasme. Le mien est définitivement parti se coucher, soudainement fatigué par le prêchi-prêcha qui rappelle par moments, en plus poli et en mieux écrit, les sorties de Léo-Paul Vous-savez-qui. À partir d'ici, on ne parle plus que de Faire appel à notre bonne volonté, c'est bien. Mais il faut se donner la peine de mettre un peu de viande autour de l'os. Comme c'est là, il n'y a rien de bien solide comme argument, et on a la désagréable impression de pédaler dans le vide. C'est peut-être ce qui arrive quand on est trop nombreux et surtout trop différents. À force de discuter pour trouver un Ça donne ce que ça donne: beaucoup de voeux pieux. Personne n'est contre la générosité et le partage. Tout le monde préfère que ça aille bien plutôt que mal. Sauf qu'on n'avait pas besoin de payer 15$ pour le lire, si vous voyez ce que je veux dire. Et paix sur terre aux hommes qui s'aiment. (*) Bédard, Éric, Le Pont entre les générations, Les Intouchables, 1998
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