Montréal,
le 26 juin 1999 |
Numéro
40
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« Make everything simple, not simpler. »
Albert Einstein
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BILLET
LES TAXES:
SIMPLE COMME BONJOUR
par Brigitte Pellerin
J'aime les choses simples. Les machins pas trop compliqués, qui
se comprennent vite sans qu'on ait besoin de les expliquer longtemps. Par
exemple, les taxes.
Savez comment je vois ça? Facile comme deux et deux font toujours
plus que quatre. Les taxes, c'est comme la carte de débit; pas besoin
de trimballer beaucoup de sous sur soi pour s'acheter de la gomme balloune
à l'épicerie, parce qu'en insérant la carte dans le
petit machin à pitons, l'épicier se paie directement en pigeant
dans mon compte de banque.
Les taxes, donc, je les vois comme un mode de paiement. On les paie pour
ne pas avoir à débourser des frais chaque fois qu'on emprunte
un livre à la bibliothèque, ou pour que les rues soient déneigées
sans qu'on ait à s'en occuper. C'est aussi un mode de redistribution
des richesses, dans le sens où les gens qui sont un peu plus à
l'aise paient pour que les pauvres puissent eux aussi utiliser les services
gouvernementaux. |
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Taxer le pratique
Et souvent, c'est plein de bon sens. Pourquoi payer chaque fois qu'on va
se mouiller les foufounes dans la piscine municipale? Pourquoi se casser
la tête à sortir son porte-monnaie chaque fois qu'on utilise
un service quand il y a moyen de payer un montant fixe – et raisonnable,
ce qui est une toute autre paire de manches – par année pour ensuite
avoir accès, « gratuitement » à
toutes les joies municipales? Pour faire une histoire courte; disons que
si je me sens d'attaque pour les manèges de la Ronde, je me paie
une passe illimitée et je n'ai plus à m'occuper de rien,
si ce n'est de trouver les toilettes.
Sauf que.
Il y une taxe que je ne comprendrai jamais, c'est celle que les automobilistes
paient pour le bénéfice des usagers du transport en commun.
Dans la région de Québec, les automobilistes paient, lors
du renouvellement de leur certificat d'immatriculation, une surprime de
30 $ par année, par véhicule, pour la STCUQ
(celle qui, incidemment, est presque aussi souvent en grève qu'en
service). Dans la région de Montréal, les automobilistes
paient une surtaxe (comme s'il n'y en avait déjà pas assez)
de 1,5¢ sur chaque litre d'essence qu'ils mettent dans leur char.
Ben quoi, entends-je, c'est pour encourager les automobilistes à
utiliser le transport en commun, mauditement moins polluant! Moui, peut-être.
Ou alors est-ce pour que les automobilistes défraient une partie
des coûts d'un service qu'ils n'utiliseraient pas de toutes manières?
Ha, p'tête ben itou...
« Une
taxe qui sert à baisser une autre taxe. Quessé? Ai-je-tu
bien lu? Je me frotte les yeux, prends une autre gorgée de café,
ça se peut juste pas! »
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La vérité, c'est que personne ne sait trop où va ce
fric. Ma petite idée, c'est que la manne se perd quelque part en
cours de route, dans les dédales bureaucratiques, parce qu'en dépit
des montants toujours plus élevés que les sociétés
de transport demandent aux automobilistes et aux gouvernements, les services
de transport en commun font toujours aussi dur (et j'en sais quelque chose)
sans que les frais d'utilisation ne cessent d'augmenter.
Bref, il y a quelque chose qui ne tourne pas rond là-dedans.
Oh, remarquez, ça ne m'empêche pas de dormir. On s'y fait,
à payer des prix de fous pour des services minables. Sauf que la
semaine dernière, une petite nouvelle en première page de
la Gazette m'a fait dresser les cheveux sur la caboche.
Taxer une baisse de taxes
Paraîtrait que les administrateurs des sociétés de
transport du coin demandent qu'on double la surtaxe dans la région
de Montréal, qui passerait de 1,5¢ à 3¢ le litre
d'essence. Et pourquoi ça? Pour récolter un joli 48
millions $ de plus par année, qu'ils disent. Serait-ce pour
enfin remplacer les autobus à plancher bas? Pour retaper les escaliers
roulants des stations de métro qui sont en panne au moins deux fois
par semaine? Pour mettre du déodorant surpuissant à Berri-UQAM?
Pantoute.
Imaginez ça, l'augmentation de la surtaxe irait massivement dans
les poches des municipalités de la région métropolitaine,
pour leur permettre de baisser leurs taxes municipales. Une taxe qui sert
à baisser une autre taxe. Quessé? Ai-je-tu bien lu? Je me
frotte les yeux, prends une autre gorgée de café, ça
se peut juste pas! Ben voyons donc, il y a quelqu'un, quelque part, qui
a sérieusement perdu les pédales!
Je relis attentivement; heille! c'est bien ça. Et le lendemain,
un entrefilet confirme la nouvelle: les administrateurs des sociétés
de transport en commun demandent bel et bien une augmentation de la surtaxe
sur l'essence pour que les municipalités de la région de
Montréal puissent baisser leurs taxes municipales.
Quand tu l'as pas, tu l'as pas.
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