Montréal,
le 26 juin 1999 |
Numéro
40
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LE
QUÉBÉCOIS LIBRE sollicite des textes
d'opinion qui défendent ou contestent le point de vue libertarien
sur n'importe quel sujet d'actualité. Les textes doivent avoir entre
700 et 1200 mots. Prière d'inclure votre titre ou profession et
le village ou la ville où vous habitez.
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MOT POUR MOT
LES NOUVEAUX RAISINS DE
GÉRALD TREMBLAY
Bonnet blanc péquiste, blanc bonnet libéral,
on le sait, c'est du pareil au même. Sous le dernier mandat Bourassa-Johnson,
l'équivalent de l'actuel ministre Bernard Landry – le saupoudreur
de subventions aux entreprises et défenseur jovialiste de l'intervention
du gouvernement dans le développement économique – se nommait
Gérald Tremblay.
Comme ministre de l'Industrie, du Commerce, de la Science et de la Technologie,
il est surtout passé à l'histoire pour avoir popularisé
le concept des « grappes industrielles »,
qui lui a permis de plaquer un vernis de nouveauté et de respectabilité
intellectuelle sur la bonne vieille méthode de distribution de fonds
publics. Empruntée à un professeur de gestion américain,
la théorie se servait d'une évidence – le fait que des entreprises
de secteurs connexes se développent souvent par « grappes
», en relations mutuelles les unes avec les autres, dans une
même région – pour justifier que l'État intervienne
dans le but de promouvoir ces interconnexions.
Le concept est vite passé en désuétude, on parle plutôt
aujourd'hui de « synergie » ou de «
réseaux virtuels », ce qui veut dire la
même chose. Et même s'il a laissé tombé la terminologie
viticole libérale, le ministre péquiste Bernard Landry est
exactement sur la même longueur d'onde que son ex-collègue
quant au paradigme de fond, c'est-à-dire la croyance qui veut que
les politiciens et bureaucrates savent mieux que les gens d'affaires comment
ceux-ci devraient gérer leurs entreprises. |
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Quoi qu'il en soit, Gérald Tremblay est maintenant de retour sur
la scène publique pour nous présenter une nouvelle version
remâchée de sa bouillie interventionniste. Comme on l'apprend
dans un texte d'opinion publié dans La Presse du 18 juin
dernier, l'ex-ministre vient de mettre sur pied l'Institut pour le progrès
socio-économique, un think tank qui proposera «
un nouveau pacte socio-économique » aux
Québécois pour faire face aux défis de la mondialisation
et de la nouvelle économie.
Comme tous les charlatans intellectuels qui se prennent pour des visionnaires
mais n'ont rien de pertinent à dire, M. Tremblay empile
les clichés sur les lieux communs et utilise constamment les mots
« nouveau », « avenir »
et tous les termes qui réfèrent au changement d'époque.
Pour éviter aux lecteurs du QL d'avoir à se casser
la tête en essayant de comprendre de quoi il s'agit, nous publions
ici quelques extraits représentatifs de ce texte, de véritables
perles d'insignifiance qui mériteraient de faire partie d'une anthologie:
« Il faut reconnaître que ce modèle issu de la Révolution
tranquille nous a très bien servi et, au fil des ans, nous a permis
de rattraper le retard accumulé dans le passé,
tout en nous ouvrant de réelles perspectives
d'avenir. »
« Gérald Larose, le président sortant de la Confédération
des syndicats nationaux (CSN), affirmait récemment: “Je refuse de
me faire proposer comme avenir
le passé.” Voilà le genre de leitmotiv que nous devrions
tous adopter pour passer à l'action. D'autant plus que notre réalité
a considérablement évolué au cours des 20 dernières
années, si bien que notre avenir est
déjà en rupture avec notre passé.
»
« Sur le plan politique, la mise en
place d'une coalition internationale, en 1991, pour riposter à l'invasion
du Koweit par l'Irak et, plus récemment, la contre-attaque des forces
de l'OTAN au Kosovo pour repousser l'offensive serbe sont des manifestations
d'ordre transnational relativement inusitées
dans l'histoire.
»
« De précédent en précédent, on est en
train de construire un avenir unique en son
genre, du jamais vu. »
« La nouvelle
société qui émergera
de tout ce fracas se bâtit actuellement sur des tendances conflictuelles,
entre mondialisation et identité, entre homogénéité
et individualité. »
« Les mêmes forces, les mêmes valeurs qui ont présidé
à la Révolution tranquille sont toujours présentes
en chacun de nous. Elles sont pour ainsi dire innées, donc impérissables.
Si ce n'est que ces forces et ces valeurs ont été refoulées
au plus profond devant la croissance implacable du mal dévastateur
de cette fin de siècle:
la distribution inégale de la richesse. »
« Pour maintenir la stabilité sociale, il est urgent et nécessaire
d'agir à la base et de procéder à un nouveau
mariage, une réunification des trois
grands facteurs de progrès: le social, l'économique et le
politique. »
« Dans un tel contexte de changement,
il existe bel et bien une clef pouvant faire fonctionner les nouveaux
mécanismes de la prospérité
tout au long du prochain millénaire.
Cette clef, on la trouvera dans l'établissement d'une nouvelle
culture qui rallie les aspirations du plus
grand nombre et qui repositionne chacun dans la société,
autrement dit d'un nouveau pacte socio-économique
qui donne un sens aux expériences à vivre dans le contexte
actuel de mondialisation. »
« Le gouvernement doit gouverner en
favorisant l'éclosion d'un nouveau
partage des valeurs. Pour bien concevoir l'avenir,
il est impérieux de mettre en place une nouvelle
forme d'interdépendance et de collaboration
entre la société civile, l'entreprise et le gouvernement.
»
« Le défi du XXIe siècle
sera de travailler à la création d'avantages compétitifs
basés sur la connaissance, les relations humaines, la confiance
et la coopération. Il faut donc décloisonner les visions
et s'atteler à la tâche en misant sur nos forces et en se
partageant mieux les rôles. Il ne s'agit pas de transférer
le poids des uns sur les autres, mais au contraire de mieux équilibrer
les forces pour faire jaillir les sources cachées de la croissance
(connaissance, confiance, synergie, vision, etc.) à l'aide d'une
stratégie commune axée sur l'innovation
constante. C'est ainsi que la société
civile sera renforcée, l'entreprise, vivifiée, le gouvernement,
recentré. »
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