Moins pratique que le boulanger
En effet, votre boulanger offre cet énorme avantage sur l'État,
que lorsque vous n'êtes pas satisfait de ses services, vous êtes
libre d'aller voir son concurrent. Vous pouvez même essayer de le
concurrencer en ouvrant une autre boulangerie. Il ne vous forcera pas à
acheter son pain, il ne vous empêchera pas d'aller chez son concurrent,
il ne vous interdira pas d'ouvrir une autre boulangerie et de le concurrencer.
En revanche, quand l'État se mêle de l'assurance maladie par
exemple, et que vous n'êtes pas satisfait de ses services, vous n'avez
plus qu'à prendre votre mal en patience. Il vous défendra
absolument de ne plus payer les cotisations correspondantes. Il vous interdira
de le concurrencer en fondant votre propre compagnie d'assurance maladie.
C'est que notre « bienfaiteur » prétend
savoir beaucoup mieux que nous ce qui nous est profitable et pour que nous
ne nous portions pas préjudice en usant d'une liberté dont
nous ne saurions que faire, il nous interdit de nous procurer ailleurs
les services dont il s'occupe. C'est étrange de la part de quelqu'un
qui devrait, en principe, être le garant de toutes les libertés
auxquelles nous pouvons prétendre; celles de choisir librement nos
fournisseurs et de dépenser notre argent comme bon nous semble en
font pourtant partie. Mais comme on disait à une autre époque:
« Les voies du seigneur sont impénétrables.
»
« Votre
boulanger a cet énorme avantage sur l'État, que lorsque vous
n'êtes pas satisfait de ses services, vous êtes libre d'aller
voir son concurrent. »
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Je me demande quand même quelle tête vous feriez si votre garagiste,
cherchant à suivre un exemple aussi illustre, vous tenait le discours
suivant:
« Je suis celui qui répare
le mieux les voitures.
Vous devez donc passer par mes services puisque
c'est dans votre intérêt.
Je pense même que je dois vous empêcher
de passer par les services de quelqu'un d'autre puisqu'il vous réparerait
fatalement moins bien que moi votre voiture.
Pour ce faire, je pense soudoyer des légistes
qui écriront un règlement stipulant que nul autre que moi
n'a le droit de s'occuper de réparer les voitures et que tous ceux
qui ont une voiture à réparer doivent passer par mes services.
Il faudra bien entendu prévoir un service
d'ordre pour veiller à remettre dans le droit chemin tous les contrevenants
qui ne comprendront pas que tout ceci est fait dans l'intérêt
général et qui essaieront d'outrepasser ces décrets
célestes.
Cela m'obligera bien entendu à imposer
quelques frais supplémentaires à ceux de la seule réparation
de votre voiture mais vous n'aurez pas lieu de vous en plaindre car, comme
je vous l'ai déjà dit, je suis le meilleur et le moins cher.
Je ne doute pas que vous accepterez ce contrat
qui est tout à votre avantage et que vous voudrez bien me donner
un premier acompte pour mes services. »
L'État n'est vraiment pas un commerçant comme les autres.
Espérons qu'il parvienne à les égaler un jour.
(*) Christophe Vincent travaille
dans l'informatique et vit à Paris. >> |