Montréal, 18 déc. 1999 - 7 jan. 2000 |
Numéro
52
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(page 7) |
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Le bonheur 101
Le bonheur, la jouissance totale (ça pourrait aussi s'appliquer aux racks-à-jos qui fittent comme il faut), ça ne s'apprend pas dans les livres. Notre maman ne peut nous donner TOUS les conseils applicables, et nos chums ne savent généralement pas trop quoi nous dire – humpf, comme si les gars étaient capables de donner des conseils. À part, bien sûr, de nous dire de faire ce qu'on a envie de faire. Et c'est là le noeud de l'affaire. Avant de savoir, pour vrai, ce qu'on aime ou n'aime pas, il faut essayer. Beaucoup. Il faut faire des erreurs, des gaffes, et quelques petites avancées dans la bonne direction. Et ça, personne d'autre que nous-même ne peut le faire. Personne ne peut nous dire quoi et comment, quand ou bedon y'où. Dans quel sens? Avec quel type de partenaire? Les yeux fermés? Les orteils retroussés? Avant ou après la fondue au fromage? Avec ou sans amour? Et comment on fait pour le savoir VRAIMENT, si on est en amour? Il faut évidemment qu'on se fasse une idée, qu'on arrive à poser un jugement sur ce qu'on aime et n'aime pas, jugement qui soit aussi éclairé que possible. Ça prend du temps, des efforts, de l'expérience, des cris et des grincements de dents. Et trois sourires par année, les bonnes années. Mais il n'y a pas d'autre moyen d'y arriver. Enfin, pas que je sache. Et comme on dit au hockey (histoire de respecter mon premier paragraphe): Y'en a pas de faciles. On ne peut pas les gagner toutes. S'éviter les concombres Et c'est pour cette raison que les gens autour de nous, trop souvent bien intentionnés, essaient de nous restreindre, de nous empêcher de faire trop de conneries. C'est d'la marde, pour une raison toute simple: pour connaître ce qui est bien, il faut connaître ce qui est mal; pour savoir ce qui nous plaît, il faut savoir ce qu'on déteste.
Il faut être libre de faire des erreurs, des gaffes, si on veut un jour arriver à faire un bon coup. Une fois rendus à l'âge (plus ou moins) adulte, les gens autour de nous doivent nous ficher la paix et nous laisser expérimenter à notre aise. Autrement, on ne réussit qu'à produire des poltrons, des pas-déniaisés, des nonos. Et des mecs qui se font embobiner en moins de deux par une pitoune qui connaît bien la chanson. Et des tartempions qui restent assis sur leur steak, de peur qu'en le bougeant, ils ne se refilent un burn-out. C'est la même chose à grande échelle. Plus les gouvernements et les pouvoirs publics se mettent en tête de nous protéger contre nous-mêmes, plus ils contribuent à créer une société de concombres. Plus on nous protège contre toutes sortes d'affaires Quoi? Vous dîtes? Ah oui, c'est déjà commencé... Prenez la perte d'emploi. Ça arrive, et c'est plate en maudit quand ça nous arrive à NOUS. Mais de recevoir des primes de chômage pendant plus que, disons, deux semaines, ça nous empêche d'essayer toutes sortes de jobs afin de se sortir de l'argent public. Ça nous aide à rester dans un domaine qui, peut-être, n'est pas le meilleur pour nous. Et puisqu'on n'essaie pas, comment pourrait-on le savoir? Laissons le bon monde libre de faire des conneries, c'est la seule manière de les aider à faire des bons coups. Et puis une fois les erreurs passées – et, espérons-le, les leçons apprises – ces gens sauront pourquoi, et pourquoi pas, ils sont heureux et bien dans leur peau. Essayez-donc ça, comme résolution du Nouvel An. Articles précédents de Brigitte Pellerin |
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