|
Montréal, 11 novembre 2000 / No 71 |
|
|
par
Yvan Petitclerc
Mordecai
Richler,
National
Post, 16 octobre 1999
|
De nos jours, on dit qu'il n'y a plus de tabous ou de questions dont on ne parle pas. Faux. Il y en toujours au moins une et elle concerne la question raciale et les Juifs. Et ce particulièrement en regard de cette notion de promotion de la diversité, voire des minorités. Mais au fond il n'y a rien d'étonnant à ce qu'on n'en parle pas. C'est la confusion totale. Sans compter l'interdit qu'a jeté sur cette question toute l'horreur de la Seconde Guerre mondiale. Résultat? On a aujourd'hui d'un côté des mouvements suprémacistes du Tabou! Quel tabou? En 1996, suite à certains incidents s'étant produits entre les communautés juive et noire et ayant donné lieu à des excès verbaux de la part de membres cette dernière, le Jewish Post de New York écrivait: Quelques mois plus tard, commentant un ouvrage tentant de jeter un nouveau pont entre les deux groupes, le quotidien USA Today écrivait: Sur le site du Congrès juif mondial: David Horowitz dans Salon magazine à propos des meurtres de Nicole Simpson et Ron Goldman (Juif) par l'ex-vedette de football O.J. Simpson: Dans Forbes Magazine, Puff Daddy (le rapper) préfère parler de sa marque et de son désir de surpasser le plus important Blanc du monde de la musique, un milliardaire:
Il est à noter par ailleurs que toute cette problématique n'a rien de complètement nouveau. En 1966 lors d'une entrevue qu'il réalisa avec le chef du Parti nazi américain, George Lincoln Rockwell, pour le compte du magazine Playboy, l'écrivain noir Alex Haley (Roots) questionnait déjà les accusations de ce dernier (supposé complot juif pour détruire la civilisation blanche) en ces termes: À la même époque, l'ex-champion boxeur Muhammed Ali faisait d'ailleurs lui aussi cette même association lors d'un entretien avec le magazine Playboy: Deux poids, deux mesures Aussi cruellement ironique ou arbitraire que tout cela puisse apparaître, particulièrement en regard de la notion de race dans l'histoire, tout cela n'en est pas moins extrêmement révélateur de certaines tendances lourdes et inévitables. Car si les Juifs par exemple sont toujours (dans certains contextes) membres d'une minorité aux États-Unis ou au Canada par exemple, il ne peuvent cadrer dans la notion actuelle d Aujourd'hui par exemple, on parle beaucoup de quotas visant à faire la promotion de la diversité (mot devenu complètement fourre-tout s'il en est un) au sein de la fonction publique québécoise. Or attardez-vous un moment à l'utilisation de cette notion dans la majorité des médias et vous vous rendrez rapidement compte que l'on parle tantôt de Voyez un peu: Mais de quoi parle-t-on ici? Les Jason Alexander, Jerry Seinfeld et Julia Louis-Dreyfus ne sont tout à coup plus le reflet d'une diversité? Au fait, est-ce que pour une organisation noire ou Latino, Steven Spielberg, Jeffrey Katzenberg et David Geffen du nouveau studio DreamWorks (tous les trois Juifs et multi-millionnaires) sont l'incarnation de méchants capitalistes blancs oppresseurs des minorités?... Idem pour Larry Ellison, le fondateur d'Oracle ou encore Edgar Bronfman peut-être? On peut aussi penser au monde du sport professionnel. Lors de la grève passée des joueurs de basketball de la NBA on entendait couramment dire qu'il n'était pas normal qu'une ligue qui compte 80% de joueurs noirs ne comptent que des propriétaires blancs. Or parmi ces propriétaires blancs se trouvent des Juifs tels Walter Haas des A's d'Oakland, Barry Ackerly des Supersonics, Ted Arison du Heat de Miami, Gordon Gund des Cavaliers de Cleveland, Jerry Reinsdorf des Bulls de Chicago ou encore Donald Sterling des Clippers. Sans compter David Stern, le commissaire, également juif. Doit-on conclure que pour une organisation vouée à la promotion de la diversité, il n'y en a donc pas au sein des propriétaires de la ligue professionnelle de basketball? Parlez de la promotion des minorités au sens large et les Juifs en font partie. Parlez de la diversité à Hollywood et Oups! les voilà devenus l'incarnation du pouvoir blanc. Parlez du racisme et Oups! les revoilà redevenus un autre groupe racial. Parlez de quotas en faveur des minorités visibles et Oups! revoilà les élites de cette communauté redevenues contre celle-ci. Parlez des Dans la lignée de notre obsession de la promotion des minorités, nous avons aussi développé évidemment l'obsession du quota. Parce qu'il y a cinquante pour cent de femmes en société il nous faut à tout prix 50% de femmes au Parlement, etc. Même lorsqu'on ne parle pas de quotas précis, il faut maintenant à tout prix que chaque secteur de la société (gouvernementale s'entend) soit Il y a 12% de Noirs aux USA et 80% dans la NBA. Un quota pour diminuer leur nombre dans la NBA tant qu'à y être? Il y a 3 ou 4% d'Asiatiques aux États-Unis, mais ils raflent 40% des prix scolaires en sciences. Un quota pour diminuer leur nombre? Il y a 50% d'hommes dans la société québécoise, mais une proportion bien inférieure de travailleurs en garderie ou de professeurs au primaire. Et puis après? Où est le problème. Ils préfèrent être ailleurs tout simplement. Au fait, dix nouveaux immigrants font aujourd'hui partie de la liste des 400 citoyens les plus riches des États-Unis. Neuf des dix proviennent d'Inde, de Taïwan ou de Corée. Je suis sûr qu'ils se sentent terriblement victimes de discrimination et qu'ils se meurent tous d'impatience en attendant le jour où ils pourront enfin, grâce aux politiques de discrimination positive, quitter la misère de leur villa de West Palm Beach pour travailler pour le gouvernement fédéral américain. Et n'allez surtout pas penser, Oh horreur!, que s'ils n'y sont pas en plus grand nombre, c'est peut-être parce qu'ils n'en ont tout simplement pas envie ou qu'ils ont mieux à faire....
|
<< retour au sommaire |
|