Montréal, 4 août 2001  /  No 86  
 
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Marc Grunert enseigne les sciences physiques dans un lycée de Strasbourg et anime le Cercle Hayek, consacré à la réflexion et à la diffusion du libéralisme.
 
CHRONIQUE DE RÉSISTANCE
 
LA POLICE ÉCOLOGISTE, 
C'EST POUR DEMAIN
 
par Marc Grunert
  
  
          Que savons-nous de l'effet de serre et de son rapport avec l'activité humaine? À peu près rien. Nous n'observons aucune convergence de vue des scientifiques. Lorsqu'ils se réunissent en congrès, aucune véritable tendance n'en ressort. Aucune affirmation claire. Mais pourtant, quelques scientifiques écologistes, quelques « experts » prennent position, davantage idéologiquement que scientifiquement. 

          Leurs discours, bien enrobés dans une rhétorique scientifique, ne consistent pas à considérer les faits et à en tirer une conclusion mais au contraire à retenir les faits qui les arrangent pour parvenir à une conclusion prédéterminée. Et cette conclusion est invariablement de nature anticapitaliste, hostile au progrès technologique.

 
          Elle contient en outre tout un volet « citoyen », une liste de prescriptions utile à toute personne aspirant à devenir un « bon citoyen » et ayant intérêt à le rester en raison du chantage permanent qu'un État écologiste ne manquera pas d'exercer. Nous en trouvons un exemple sur le site du quotidien Le Monde, dans un article de l'AFP titré: « De simples gestes quotidiens pour lutter contre l'effet de serre », et daté du 17 juillet.  

          Lorsqu'on connaît la propension des écologistes à user de la coercition étatique on se dit que ces simples gestes risquent rapidement de devenir de simples obligations. Les écologistes sont des visionnaires qui, pour sauver la planète, ne craignent pas de nous faire vivre dans un enfer orwellien. 
  
De gestes à obligations 
  
          On nous dit qu'il n' y a pas deux visions de l'écologie, de droite et de gauche. En effet, il suffit d'écouter Chirac reprendre à son compte toutes les idées des verts pour s'en persuader. En revanche, il y a une vision étatiste et une vision libérale de l'écologie. S'agissant de cette dernière, précisons qu'il n'existe pas une politique écologique spécifique; les questions écologiques ne sont qu'un cas particulier auquel s'applique la méthode libérale générale: définition précise des droits de propriété individuels, marché libre des droits.  

          La propriété privée est un meilleur rempart contre la dégradation de la planète que le collectivisme (Pascal Salin analyse la question écologique dans Liberalisme; il considère l'écologisme comme une menace pour l'environnement). Les étatistes, quant à eux, s'appuient sur un « savoir » pour imposer des contraintes censées résoudre les problèmes. Si ce savoir centralisé est défaillant, comme c'est le cas s'agissant de l'effet de serre, la contrainte sera non seulement injuste mais nuisible. 

          Un des principes de l'idéologie écologiste se résume par « small is beautiful ». L'autarcie comme principe d'économie, c'est un peu court mais c'est l'idéal de l'écologie de gauche, le retour à une économie féodale. Or le gauchisme a pris pied dans le gouvernement, puisque tous les ministres verts sont hostiles au libre-échange, au capitalisme et à l'économie de marché (ils veulent tellement la « réguler » que parler d'une économie de « marché » deviendrait un abus de langage).  

          La corrélation entre écologisme fondamentaliste et protectionnisme est un fait idéologique, pas scientifique. On peut en trouver une démonstration dans l'oeuvre de l'économiste américain feu Julian Simon, L'homme notre dernière chance (PUF, Libre échange, 1985).  
 

     « Ce mouvement écologiste ne vise finalement rien d'autre qu'à se substituer au marxisme comme "alternative" du capitalisme. L'idéologie est différente mais les moyens sont identiques. »
 
           Cette corrélation donne lieu à des recommandations complètement loufoques, comiques au possible. « Le transport des kiwis provenant du maraîcher implanté dans un rayon de 25km rejette un millier de fois moins de gaz à effet de serre que ceux transportés par avion de Nouvelle-Zélande », écrivent le Réseau Action Climat (RAC-F) et trois autres réseaux écologistes français dans une brochure de vulgarisation. Conclusion: « En achetant les bons kiwis et par une multitude d'autres gestes de la vie quotidienne M. Dupont et Mme Smith peuvent lutter contre le réchauffement planétaire ». 
  
          Autre exemple de ces gestes « citoyens »: « Renoncer à la climatisation évite jusqu'à 20% de surconsommation de carburant », ou bien encore mieux: « Une couche de givre dans le congélateur de 3mm provoque ainsi 30% de surconsommation de courant », la conclusion est évidente: si les individus sont de mauvaise volonté, l'État se chargera d'entrer dans votre congélateur (si on pouvait l'y enfermer et jeter l'appareil à la poubelle, pourquoi pas?). 
  
Destructeur de tout 
  
          Comme aime à le répéter Pierre Lemieux: « quand l'État met le pied dans la porte, on entend bientôt les bruits de botte dans le salon ». Saviez-vous qu'« une chasse d'eau qui fuit représente 250 m3 d'eau perdus en un an, soit sept kilos de gaz à effet de serre »? Ou bien qu'« un diplomate russe spécialisé dans les questions d'environnement, Vitaly Martsarski, s'était amusé à calculer en 1992, dans la revue New Scientist, le coût énergétique du repassage: 15 milliards de kw/h par an pour 730 millions d'habitants nord-américains, ouest-européens et australiens, soit la moitié de la consommation d'électricité de la Grèce en 1990 »? Tous ces pseudo-faits n'ont aucun sens. Ils ne prouvent rien mais sont un vulgaire bourrage de crâne et relèvent des techniques les plus usées de la propagande. 
  
          Ce mouvement écologiste ne vise finalement rien d'autre qu'à se substituer au marxisme comme « alternative » du capitalisme. L'idéologie est différente mais les moyens sont identiques: coercition étatique, distinction entre les bons citoyens qui obéissent à l'idéologie et les mauvais citoyens mis au ban de la société. Tous les ingrédients d'une dictature douce sont là. L'État est entré dans les lieux privés ouverts au public (entreprises, restaurants, magasins etc...), il s'apprête désormais à entrer dans votre salon, à envahir votre cuisine et à violer votre intimité là où vous n'alliez que seul jusqu'à présent.  
  
          Il vous tiendra aussi la main pour faire votre marché et vous empêcher d'acheter des kiwis de Nouvelle-Zélande. Mais le plus simple serait peut-être d'interdire d'importer ces kiwis-qui-aggravent-l'effet-de-serre, ou de surtaxer les importations puisqu'« un trajet de 1 600 km entraîne le rejet de 150 kg de gaz carbonique par avion contre 3 kg seulement par le train » et que, chaque année, « 16 000 avions relâchent dans l'atmosphère quelque 600 millions de tonnes de CO2, soit autant que la Grande-Bretagne pour l'ensemble de ses transports ». On va aussi taxer les billets d'avions, instaurer la taxe Tobin, et l'augmenter chaque année davantage. Après avoir accusé le capitalisme d'être le fossoyeur de l'humanité, les écologistes s'apprêtent désormais à finir le travail. Car on peut dire à propos de l'écologisme ce que Mises disait au sujet du socialisme.  
          Le socialisme n'est pas en réalité ce qu'il prétend être. Il n'est pas le pionnier qui fraie les voies à un avenir meilleur et plus beau; il est le destructeur de tout ce qu'ont péniblement créé des siècles de civilisation.  
  
          Il ne construit pas, il démolit. S'il venait à triompher, on devrait lui donner le nom de destructionisme, car son essence est la destruction. (L.v. Mises, Le socialisme)
 
 
 
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