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Montréal, 13 octobre 2001 / No 90 |
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par
Yvan Petitclerc
<<première partie On n'en est manifestement plus à une exagération près. Tout cela devrait surtout nous faire comprendre une seule chose. À s'adonner obstinément à la surenchère des cadavres du passé, il n'y a pratiquement plus de limites aux débordements possibles. Et surtout, dans bien des cas, la chasse aux sorcières côtoie alors le ridicule. Le soir de l'assermentation du nouveau chef du Bloc québécois, un individu se présenta derrière le candidat défait Yves Duhaime, arborant un drapeau ou les traditionnelles fleurs de lys avaient fait place à la croix gammée. Deux jours plus tard, des graffitis de croix gammée faisaient cette fois leur apparition sur l'immeuble abritant le journal anglophone The Suburban. |
Délires uniques au Québec? Malheureusement, la réalité
à l'étranger dénote autant d'exemples d'abus de langage
ou de gestes stériles. Le commentateur radio américain Rush
Limbaugh parle de feminazis pour désigner les féministes
radicales, les opposants au projet de loi sur la cigarette en Ontario parlaient
de L'affaire Foglia L'un des exemples les plus aberrants de ce rituel d'excuses publiques fut par ailleurs ce qu'il serait désormais convenu d'appeler l'affaire Pierre Foglia. Dans sa chronique de La Presse du 7 novembre 1996, il notait: Ces propos lui valurent.... des accusations de la part du Congrès juif! Cependant, comme il devait lui-même le rapporter ultérieurement, le responsable de son cas à la direction des enquêtes de la Commission des droits de la personne devait plus tard signifier au Congrès juif qu'il avait décidé de ne pas retenir la plainte ayant été portée contre lui, statuant en substance que son propos ne constituait en rien un quelconque propos haineux ou diffamatoire. Cet événement amena alors Foglia à s'interroger sérieusement sur ce qu'il était désormais possible de dire sur cette communauté en ces termes:
Quant à son questionnement, à savoir s'il est permis de dire certaines choses sur certains groupes, la réponse est simple: oui. Mais surtout assurez-vous de faire partie du groupe dont vous parlez avant. C'est parce qu'elle est elle-même lesbienne que Camille Paglia a pu écrire que lorsqu'un homme devient gai, il gagne vingt points de quotient intellectuel, et que lorsqu'une femme devient gaie elle en perd vingt. Sous la plume de quelqu'un d'autre, on aurait automatiquement crié à l'homophobie. Que dis-je. À la lesbophobie. Droit de parole limité C'est parce qu'il est lui-même noir que le mannequin pour Ralph Lauren, Tyson Beckford, pouvait un jour dire à la blague à l'animateur Keenan Ivory Wayans qu'il ne connaissait pas un seul Noir qui n'avait passé au moins un après-midi en prison. C'est parce qu'ils sont eux-mêmes juifs que Charles S. Liebman et Steven Cohen purent écrire dans Commentary que C'est parce qu'il est lui-même gai qu'Elton John peut dérisoirement s'auto-proclamer la nouvelle reine des coeurs à Oprah ou que, lors de sa sortie publique sur son orientation sexuelle au mois de décembre 1998, l'ex-champion de natation canadien Mark Tewksbury pouvait blaguer sur son image de Malgré cela, ce droit de parole demeure loin d'être garanti. Ce n'est pas parce qu'on s'appelle Salman Rushdie qu'on peut réfléchir aussi librement qu'on le voudrait. Le danger auquel faisait allusion Foglia est réel, et ce pour absolument n'importe qui, que celui-ci parle à titre individuel ou encore au nom d'un groupe. Tout le monde peut s'excuser Au moment où la controverse éclatait entre certains leaders des communautés juives et noires aux États-Unis au sujet de la participation des Juifs à la traite d'esclaves noirs dans le passé, Stanley Halpern, Juif lui-même établi en Floride, faisait parvenir une lettre aux diverses organisations juives américaines ainsi qu'à différents médias. Il appelait alors ses pairs à ne pas refuser le dialogue avec Louis Farrakan le leader de la Nation de l'Islam. Mais il notait également: Poursuivant sur cette lancée, il expliquait: Je vivrai peut-être assez longtemps pour entendre un évêque demander des excuses à un historien de l'art pour avoir parlé du pape de l'art Pop (Andy Warhol) du pape du surréalisme (André Breton) ou encore empruntant les mots de Williams Burroughs pour parler d'un film de John Waters, du pape de la cochonnerie ( Heureusement, il y a Camille Paglia et Ted Turner. Suite au suicide collectif de Rancho Santa Fe en Californie, au printemps 97, ce dernier expliqua dans une déclaration typique:
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