Montréal, 11 mai 2002  /  No 104  
 
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Stefan Metzeler est informaticien indépendant (www.amadeus-3.com). Il habite près de Lausanne en Suisse et est co-fondateur de l'organisation libérale Pro Libertate.
 
OPINION
 
LES ARMES NOUS PROTÈGENT
CONTRE LES CRÉATURES DE L'ÉTAT
 
par Stefan Metzeler
  
  
          L'événement tragique récemment survenu à Erfurt en Allemagne, où un étudiant a tué 16 personnes à son école et s'est ensuite suicidé, relancera encore une fois le débat autour des armes. Je voudrais partager une observation personnelle sur le sujet des armes qui en fera peut-être réfléchir certains.
 
Mon contact avec les armes 
  
          Vivre tranquillement dans un pays pacifique, tel est sans doute le désir de toute personne libérale. Durant mon enfance et mon adolescence en Suisse – entrecoupés de nombreux voyages à l'étranger avec ou sans mes parents –, j'avais l'impression de vivre dans un pays paisible, malgré les agressions de camarades de classe. Je ne me sentais jamais menacé par des adultes et je me sentais en parfaite sécurité partout sauf dans la cour de l'école publique, que j'étais bien obligé de fréquenter. Le seul contact que j'avais avec les armes était le foutu fusil d'assaut qu'on m'a forcé à porter pour mes 19 ans et qui pourrissait dans ma cave, symbole de l'esclavage, c'est-à-dire le service militaire, auquel j'avais été soumis. 
  
          Puis, un jour, un couple de voisins tranquilles qui vivaient dans l'appartement à côté du mien depuis 5 ans m'invitèrent chez eux pour me montrer deux collections dont ils étaient très fiers. Une d'énormes coquillages qu'ils avaient eux-mêmes ramassés au fond de la mer et l'autre, d'une cinquantaine d'armes de toutes les formes et tous les calibres imaginables, y compris des fusils à canon scié, de chasse à l'éléphant et des mitrailleuses légères. 
  
          Comme le voisin en question était un tranquille petit voyageur de commerce très discret, tout comme sa femme, les deux correspondant donc parfaitement au modèle de la tranquillité helvétique avec un appartement propre et en ordre, cela m'étonna grandement. 
  
          J'apprenais ainsi beaucoup de choses: 
  • qu'une personne qui « aime » les armes n'est pas forcément un Rambo dangereux;
  • que la présence de 50 armes à 10 mètres de chez moi n'avait jamais menacé ma sécurité, au contraire;
  • qu'en fait, un très grand nombre de personnes en Suisse disposent de collections de ce genre;
  • et que ça non plus n'était pas nuisible à ma sécurité.
          J'étais loin de vouloir acheter une arme pour moi-même, pensant toujours que c'était tout de même un instrument dangereux et inutile, puisque de toute manière le monde était si sûr. Je croyais pour l'essentiel le discours des bien-pensants, comme pour le reste. Oui, je savais qu'à l'étranger, il y avait encore plein d'endroits dangereux et pas encore civilisés – comme Paris, New York ou Guatemala City. Je me sentais assez menacé dans certains cas, surtout à Guatemala City, où un militaire armé était posté à chaque coin de rue, sauf dans les quartiers pauvres, où on m'avait déconseillé d'aller – ce qui ne m'a pas empêché de le faire quand même. Je m'en suis sorti en prenant un profil bas... 
  
Une punition collective 
  
          Puis le vent a tourné. Dans notre pays paisible, certaines voix s'élevèrent pour demander qu'on interdise les armes, ce qui m'étonna encore une fois grandement, puisqu'elles ne représentaient pas un problème. Je ne comprenais pas pourquoi on voudrait enlever les armes de mes anciens voisins, ce gentil couple, par exemple. Surtout que les crimes semblaient toujours être commis avec des armes illégales et par des gens qui, d'après la loi, n'auraient de toute façon pas dû en posséder, dont des demandeurs d'asile et d'autres « étrangers ». (Je souligne tout de suite que je n'ai rien contre les étrangers, mais les statistiques sont les statistiques; le seul point intéressant, c'est qu'ils n'avaient légalement pas le droit de posséder des armes, contrairement aux étrangers installés en Suisse depuis un certain temps, qui acquièrent le droit de posséder des armes et qui ne s'en servent pas plus que le Suisse moyen.) 
  
     « Même si certaines personnes pouvaient dérailler et se servir d'une arme légale, priver les autres personnes de leurs droits et de leurs biens ressemblait beaucoup à une punition collective, une chose que je n'ai jamais trop aimé, ni à l'école, ni à l'armée. »
 
          Et même si certaines personnes pouvaient dérailler et se servir d'une arme légale, priver les autres personnes de leurs droits et de leurs biens ressemblait beaucoup à une punition collective, une chose que je n'ai jamais trop aimé, ni à l'école, ni à l'armée. En fait, je conspue le principe même, c'est ignoble et honteux. 
  
          Puis vint mon ami Christoph, qui nous a éclairé sur la véritable signification des armes. Il nous relayait les écrits de Pierre Lemieux, auteur québécois de Le droit de porter des armes et récemment de Confessions d'un Coureur des bois, qui est tout à fait jouissif. Sur quoi je suis parti m'acheter ma première arme, un Beretta 92F semi-automatique 9mm, avec 4 magasins 15 coups, que j'ai actuellement à côté de moi, sur mon bureau. Chargé et prêt à l'emploi. Le symbole de ma liberté. 
  
Pression mondiale 
  
          À présent, partout dans le monde les populations civiles sont exposées à une pression terrifiante pour abandonner leurs droits et leur seule protection contre le fascisme gouvernemental. Qui plus est, les événements qui sont censés justifier cette confiscation sont presque entièrement des fabrications de ces mêmes États. Partout, aux États-Unis, en Allemagne, au Japon, en France et en Suisse, les écoles publiques et les politiciens sont de toute évidence la source de la haine la plus profonde, le déclencheur d'agressions terrifiantes – et de plus, pour les écoles du moins, des lieux remplis de moutons sans aucune défense, marqués « Ici bétail à abattre ». 
  
          Je suis étonné que personne ne semble faire ce constat pourtant flagrant: pourquoi donc les élèves des écoles publiques deviennent-ils de plus en plus sociopathes? Sans aller jusqu'à dire que ça explique l'acte d'Erfurt par exemple – le meurtrier était de toute évidence mentalement instable –, je suis sûr qu'il devait ressentir un peu la même chose que moi, qui ne me suis jamais senti en sécurité dans la cour d'école publique lorsque j'étais enfant. Comment les mêmes États dont les institutions d'enseignements échouent de manière si lamentable devraient-elles être en mesure de nous protéger de leurs propres créatures? 
  
          L'association est peut-être lointaine, mais on est bien obligé de penser à Ossama ben Laden, un pur produit de la CIA. Celle-ci se sert pourtant aujourd'hui du monstre qu'elle a créé pour obtenir des budgets plus gros que jamais. Dans quel autre système est-ce qu'on récompense ainsi l'échec? 
  
          Mon expérience personnelle m'a convaincu de l'importance de la question des armes. Ce ne sont en effet pas les armes elles-mêmes qui sont importantes, mais bien ce qu'elles représentent: la différence entre la liberté et l'esclavage. 
 
 
 
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