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Montréal, 6 juillet 2002 / No 106 |
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entrevue
avec Joseph T. Salerno
The Analyst, publié par l'Institut des analystes financiers agréés de l'Inde (ICFAI), a interviewé Joseph T. Salerno, éditeur du Quaterly Journal of Austrian Economics, à propos du chaos financier et bancaire en Argentine. Question: Est-ce que les réformes proposées par le gouvernement argentin sont suffisantes pour justifier que le Fonds monétaire international (FMI) apporte une aide? Joseph T. Salerno: Pour commencer, c'est le FMI qui est responsable du désastre survenu en Argentine. En appuyant publiquement l'Argentine et en l'aidant à implanter, en 1992, un régime dans lequel le peso serait maintenu à parité avec le dollar américain, le FMI a donné aux investisseurs internationaux la garantie implicite qu'elle soutenait la dette publique argentine. |
Cela
a précipité l'entrée de capitaux étrangers
en Argentine, induite par la perspective de rendement élevé
et de risques faibles. Ces fonds ont été utilisés
par le gouvernement argentin pour une forte et improductive expansion du
secteur public. Mentionnons, à titre d'exemple, la croissance énorme
des dépenses par les divers paliers gouvernementaux, que ce soit
pour la création d'emplois de fonctionnaires et leurs salaires,
ou pour le financement de projets et de programmes au bénéfice
des grandes entreprises et des corporations ayant leurs entrées
chez les politiciens.
Pendant ce temps, l'investissement dans les petites et moyennes entreprises, particulièrement celles qui exportent, a d'abord stagné pour ensuite diminuer. La promotion par le FMI de ce régime fiscal malsain et instable est éloquemment illustré par le fait que le quart des obligations en provenance de pays émergents détenues sur les marché internationaux provient d'Argentine. Q.: Quelles sont les étapes nécessaires à la restauration de la santé fiscale et de la prospérité économique? JTS: Premièrement, le gouvernement argentin doit refuser l'assistance et les conseils de l'inepte bureaucratie qu'est le FMI. Deuxièmement, il doit admettre ouvertement son insolvabilité et répudier de façon unilatérale toute dette publique précédemment émise. Cela permettra au gouvernement national de se défaire immédiatement de son service de la dette, lui permettant ainsi de réduire ses dépenses de 20 pour cent et d'équilibrer, ou presque, son budget. Puisque les marchés internationaux n'investiront plus de sitôt dans la dette argentine, les gouvernements provinciaux et national seront forcés d'agir à l'intérieur des contraintes bénéfiques d'un budget équilibré. Toutefois, cela fera fuir également les investisseurs du secteur privé, si ce n'est que de façon temporaire, de sorte que l'Argentine devra implanter des mesures pour que l'épargne et l'investissement soit relancés. Donc, la troisième étape est de réduire le financement du secteur public de 20 pour cent en réduisant à la fois les dépenses et les revenus de taxes et en visant particulièrement les organismes de réglementation et la fonction publique. Cela libérera le secteur privé et lui procurera les ressources en main-d'oeuvre et en capital, tout en éliminant les gains fait par le secteur public au cours des années 1990. Q.: Les pourparlers entre le président, le FMI et le secrétaire au Trésor américain ne semblent avoir produit qu'une aide financière possible pour la fin juin. Est-ce que le gouvernement argentin peut se permettre d'attendre aussi longtemps? JTS: L'Argentine ne peut se permettre d'attendre l'aide du FMI, qui ne fait que prolonger l'insoutenable régime monétaire actuel. Elle doit agir maintenant pour réformer son système monétaire et financier, qui est en ce moment paralysé. Heureusement, le gouvernement peut implanter unilatéralement un programme qui permettra à sa monnaie de revenir en circulation comme moyen d'échange. Ceci aidera particulièrement ses citoyens les plus pauvres [qui n'ont rien à troquer] tout en restaurant la confiance dans les institutions financières et le marché domestiques. Cela implique de reconnaître la faillite effective des banques et de remettre leurs actifs aux déposants, qui sont leurs véritables propriétaires. De manière plus spécifique, les dépôts remboursables sur demande, qui incluent l'épargne et les comptes chèques, devraient être réduits au niveau de leurs réserves liquides et remis aux déposants au prorata de leur comptes d'épargne et de chèques. Puisque leurs dépôts seront maintenant contrebalancés en totalité par une réserve liquide équivalente, les déposants pourront retirer librement l'argent de leurs comptes ou continuer d'y accéder par chèques ou carte débit sans menaces de banqueroute des banques. De plus, la propriété des prêts et des actifs investis de chaque banque sera transférée aux déposants en leur distribuant sous forme d'actions. Le nombre d'actions nominales que chaque individu recevra sera égal à la quantité originelle de peso qu'il détenait en dépôts moins sa part des réserves liquides. La valeur de ces actions, qui seront négociables, sera déterminée par la valeur marchande du portefeuille d'actifs et fluctuera autour de la valeur du peso selon la qualité des actifs composant le portefeuille. Ainsi, toutes les banques seront divisées en deux institutions indépendantes: une banque n'acceptant que des dépôts dont les réserves seront maintenues intactes, donc pas de système à couverture fractionnaire, et un fond mutuel sans frais à actif mixte. Les déposants argentins auront alors accès à la fois à leurs épargnes et à un moyen d'effectuer des échanges, cela sans intervention gouvernementale. Les banques dépositaires seront dans l'obligation légale de maintenir leurs réserves intactes pour tous les déposants et elles pourront ainsi émettre des prêts au prorata des dépôts reçus.
Chaque fond d'investissement aura le pouvoir d'acheter et de vendre ses actions ainsi que ses parts dans d'autres entreprises et d'émettre des prêts. Initialement, des fiduciaires assignés par la cour seront en charge de diriger ces institutions aux frais des déposants et des actionnaires de fonds d'investissement. Il est vrai que ce programme conduira à une forte et subite déflation de l'offre de la monnaie jusqu'au niveau de la base monétaire, soit la monnaie détenue par le public et les réserves liquides des banques de dépôts. Toutefois, la rapidité et l'étendue de la contraction monétaire (tous les dépôts exigibles sur demande seront réduits du jour au lendemain par le même pourcentage) faciliteront l'ajustement des prix et des salaires au niveau approprié à la nouvelle offre de monnaie. Entre-temps, lorsque cela sera accompli et que la banque centrale argentine aura remise ses réserves liquides aux banques dépositaires, il lui sera défendu d'acquérir de nouveaux actifs et l'offre de monnaie sera stabilisée de façon permanente au niveau actuel. La banque centrale ne pourra émettre de nouveaux billets que pour remplacer en nombre égal ceux usagés et émettra aussi bien que recevra des pièces de monnaie en échange de notes bancaires de dénomination égale. Ce programme fera revivre l'échange monétaire et le calcul économique, particulièrement chez les détaillants; lorsque combiné à la réduction du fardeau fiscal du secteur public, cela stimulera une reprise et une sortie de l'actuelle dépression. Il est à noter que ce programme n'est qu'une étape liminaire à une réforme monétaire, qui doit éventuellement comprendre la vente des banques dépositaires et des fonds mutuels aux investisseurs privés, domestiques et étrangers. Q.: Puisque personne ne veut détenir de pesos qui se déprécient, est-ce que la dollarisation résoudra le problème ou en créera de nouveaux? N'y a-t-il pas de panacée pour ce pays endetté jusqu'au cou? JTS: La dollarisation n'est qu'un succédané au régime actuel qui a causé cette crise. De plus, cela ne répond pas à l'actuel problème de donner aux Argentins l'accès complet et immédiat à leur épargne toujours dans le système. Le programme que je viens de décrire non seulement arrêtera la dévaluation, mais renforcera énormément la valeur du peso à l'étranger. Encore une fois, la contraction monétaire initiale fera tomber les prix et, de manière correspondante, augmentera le pouvoir d'achat du peso. Avec la banque centrale qui ne pourra plus transiger sur les marchés domestiques et étrangers, le taux de change du peso sera porté à la hausse par les investisseurs étrangers qui voudront y mettre la main afin d'acheter les produits rendus bon marché par la dévaluation actuelle du peso. Même après un ajustement à la hausse de la valeur du peso à l'étranger suite à la contraction monétaire subite, le peso continuera de s'apprécier graduellement face aux autres devises à mesure que l'économie argentine se remettra et que la production réelle reprendra, causant ainsi une baisse des prix et une hausse du pouvoir d'achat. Q.: Le ministre argentin des Finances, Roberto Lavagna, a une tâche claire devant lui! À quoi devrait-il d'abord s'attaquer pour remettre un semblant d'ordre dans cette économie chancelante? JTS: Il doit s'attaquer au FMI qui n'arrête pas de s'ingérer dans les affaires argentines. Il devrait dire aux bureaucrates du FMI en termes clairs que leurs conseils et leur assistance n'ont pas bien servi l'Argentine et qu'ils ne sont plus les bienvenus dans ce pays. Il doit ensuite déclarer promptement, avec le consentement du président et de la législature, l'insolvabilité du gouvernement et répudier toute la dette du secteur public. Couper ensuite les dépenses et les taxes afin d'équilibrer le budget et stimuler l'épargne et l'investissement dans le secteur privé. En dernier lieu, il doit restaurer l'accès complet des Argentins à leur argent et leur épargne en suivant le programme susmentionné, par lequel la propriété des banques insolvables sera transférée aux déposants.
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