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Montréal, 28 septembre 2002 / No 110 |
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par
Christian Michel
LA PREMIÈRE LEÇON DE LA RENTRÉE — Vous savez ce que c'est qu'un voleur? (Ils le savent. Ils veulent tous répondre en même temps.) — C'est celui qui arrache des sacs à main. — Il pique des motos. — C'est quelqu'un qui prend ce qui ne lui appartient pas. |
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Très bien. Vous êtes incollables. Les dictionnaires disent
comme vous: — Les impôts? — Oui, le fisc est l'organisation qui pratique le vol de toute une population et pas seulement de quelques victimes. C'est la plus puissante des mafias, mobilisant les plus gros systèmes informatiques, usant d'espions et de délateurs, et qui recourt à la force armée si on lui résiste. Et comme tous ces fonctionnaires ont un peu honte de nous voler, ils prétendent agir pour notre bien. Le fisc n'est pas seulement le plus grand des bandits, c'est le plus grand des hypocrites. — Imaginez que Lionel et Pavel rackettent Adrien. Semaine après semaine, ils lui taxent son argent de poche. Et puis, pour faire croire qu'ils ne sont pas des brutes, ils lui achètent une poupée Barbie. — Eh, mais je ne joue pas à la poupée, moi. — Bien sûr, Adrien. Mais maintenant qu'ils te l'ont pris, ils en font ce qu'ils veulent de ton argent. C'est pareil pour vos parents. L'antimilitariste entretient l'armée, celui qui ne voyage pas comble les déficits de la SNCF… Les contribuables paient pour ce qu'ils ne veulent pas. — Mais le plus triste, voyez-vous, les enfants, c'est que le fisc vole l'argent des uns pour en donner une partie à d'autres en prétendant que c'est la — (petite voix) Ma maman travaille aux impôts. — (toute la classe) Hou!! — Bravo les enfants, vous avez raison de conspuer un agent du fisc. Mais la maman de Benoît est certainement une très bonne maman, et il n'est pas responsable du métier qu'elle exerce. Quand tu seras grand, Benoît, je suis sûr que tu choisiras un travail honnête. La leçon est finie, les enfants. À plus tard. RENCONTRE AVEC UN AGENT DU FISC Il est des gens qu'on souhaite ne jamais rencontrer, les médecins et les avocats, par exemple. Mais même si l'on préférerait ne jamais tomber malade ni être victime des quérulents, une fois le mal fait, ces professionnels nous rendent de fieffés services. En revanche, quel bien peut-on attendre du type encagoulé qui nous surprend à minuit dans un parking? Ou, pire encore, d'un inspecteur des impôts? Celui qui était assis à côté de moi a avoué sans pudeur sa nuisible activité. Je me suis dit que dans le vol Paris-Nice l'individu devait être inoffensif et pour entretenir la conversation, je lui ai posé quelques questions de circonstance: — Si réellement les hommes de l'État font un usage judicieux de l'argent qu'ils nous prennent, comment se fait-il que lorsque la pression fiscale augmente, toujours plus de gens essaient d'échapper à l'impôt? Ces contribuables réticents ne devraient-ils pas se réjouir?: — L'impôt ne vise plus le financement des biens collectifs, me répond le zélé publicain. Cette fonction est dépassée. Le marché y suffirait dans presque tous les cas. La finalité de l'impôt, à mon sens, est de réduire les inégalités. Peut-être le sentiment que nous sommes tous financièrement égaux est déjà un bien collectif en soi. Pour maintenir le lien social, il faut distribuer aux pauvres l'argent des riches. Voilà une réponse socialiste sans ambages. Ainsi le — D'accord pour donner aux pauvres, mais commençons par ceux qui le sont le plus. Je suis prêt à donner l'argent de mes impôts aux Haïtiens. Mais comme je l'ai déjà raconté, le généreux défenseur des pauvres ne l'entendait pas ainsi. — Vous êtes français et l'argent des Français doit profiter aux Français, s'écria-t-il en martelant du poing l'accoudoir entre nous. Le socialisme est inséparable du nationalisme. Quand on voit poindre l'un, son jumeau est juste derrière.
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