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Montréal, 29 mars 2003 / No 122 |
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par
Carl-Stéphane Huot
L'actuelle campagne électorale s'annonçait au moins un peu intéressante l'an dernier, ne serait-ce que par les remises en cause qui semblaient se dessiner: la fin de l'éternel débat entre fédéralistes et souverainistes, la remise en cause de l'utilité de la présence de l'État dans toutes les activités des citoyens et son corollaire, les structures pesantes, inefficaces et finalement peu utiles et enfin, le constat qui veut que l'État-providence, cette idole d'or païenne des gauchistes, n'a non seulement créé aucune richesse, mais est finalement en train de se retourner contre ses bénéficiaires (on n'a qu'à penser à la |
Mais les lobbies veillaient au grain. En une année, ils ont réussi
à pousser toute ces remises en cause sous le tapis pour au moins
quatre ans encore. Nous ne pouvons être sûrs que d'une chose:
le 14 avril au soir, les lobbies qui vivent à même les goussets
du gouvernement du Québec (nos goussets, évidemment!) seront
reportés au pouvoir.
Toute une manipulation Le nationalisme au Québec est, selon moi, le point central autour duquel toute la politique des 50 dernières années a gravité. Il est, actuellement du moins, impossible à un parti de prendre le pouvoir s'il n'est pas au moins très nationaliste. D'autres que moi l'on disséqué, soupesé, lui ont trouvé des airs allant de nombriliste à inclusif et totalement respectueux de ce que sont les autres. Aussi, certains y ont vu des relents allant de xénophobes à le-plus-meilleur-nationalisme-au-monde, si on me permet de paraphraser le franglais approximatif de notre inénarrable premier ministre fédéral. Bref, une belle bouillie. Sans refaire un tour somme toute ennuyeux de ces thèses qui vont dans toutes les directions, j'y ajouterais seulement ceci: le nationalisme a très bien servi le pouvoir, mais aussi les lobbies. Le plus souvent en empêchant la population de remettre en cause l'action du gouvernement simplement en les accusant du crime de lèse-nationalisme. Qu'il s'agisse de la Caisse de dépôt et placement, d'Hydro-Québec, de la Société d'assurance automobile du Québec, de l'intervention de l'État dans l'économie, de la gestion de l'éducation et la santé, du monopole des syndicats dans différentes organisations (villes, santé, éducation, construction...), tout se ramène à ce pseudo-consensus de la population en ces matières. Or, ce pseudo-consensus repose plutôt sur l'action des lobbies très actifs et à des médias complaisants qui font semblant de ne pas voir que les citoyens ordinaires sont sous-représentés lors des commissions au profit des syndicats, associations patronales et différents groupes – le plus souvent de gauche – qui utilisent le gouvernement comme presse-citron des portefeuilles des travailleurs. Et parce que nous Sociale-démocratie
et modèle québécois
Dans son livre L'Équité salariale et autres dérives et dommages collatéraux du féminisme au Québec (Éditions Varia, 2002), André Gélinas se pose plusieurs questions à ce propos, notamment en ce qui concerne les impacts sur l'emploi et la productivité. Mais encore là, l'idée de faire du Québec un précurseur au niveau mondial en matière de So-so-so! So-li-da-ri-té! On retrouve la main de l'État – et celle des lobbies derrière – partout au Québec. Qu'il s'agisse d'une grande entreprise qui démarre et demande des fonds publics, de lois et règlements plus ou moins stupides, de la gestion de la santé, de l'éducation, ainsi de suite. Et les protestations sont vites étouffées devant les besoins pressants des uns et des autres d'obtenir qui une loi, qui une rallonge d'argent, qui une intervention pour sauver les meubles... Bref, l'État se doit de servir à la fois de bonniche, d'arche de Noé, de Salomon, de tout ce que vous voudrez en fait. Et après, impossible de revenir en arrière, les différents intervenants qui vivent de ces montants devenant plus incrustés que des huîtres sur leur rocher. Et surtout, impensable de vérifier l'efficacité réelle des mesures mises de l'avant – incluant les sommes investies – parce que ce serait quasiment un crime au Québec. Nous en aurions besoin pourtant. Par exemple, aux médias qui annonçaient l'été dernier que le nombre de personnes dépendant des banques alimentaires atteignait un sommet, je répliquais, par le biais d'une lettre ouverte, qu'il était possible à une personne de demander de l'aide à plusieurs banques, puisqu'il n'y avait aucun contrôle. Aucune de ces banques ne s'est donnée la peine de me répondre. Pour rester dans le ton de l'actuelle campagne, les puissants lobbies de la santé s'opposent à toute modification de l'actuelle manière de faire, sous prétexte de douteux Résultat? Des attentes interminables, des gens qui sont de plus en plus mécontents des services qu'ils reçoivent et des syndicats qui ont beau jeu de demander des augmentation salariales et de personnel pharaoniques. So-so-so! So-li-da-ri-té! Je ne sais pas ce qui est le plus ironique dans tout cela: que les citoyens soient en colère contre le gouvernement au lieu de l'être contre les syndicats ou que les différents gouvernements successifs se soit livrés pieds et poings liés à ces mêmes Retournement de situation Cet État-providence, justement par son poids, son coût monstrueux et son interventionnisme à tout crin, n'est-il pas en train de se retourner contre les gens qu'il prétend servir? Le QL s'est longuement étendu sur le cas de la crise du logement, et du refus de la gauche de considérer les logements comme des entreprises en y voyant plutôt un Mais il y a d'autres exemples, à commencer par la difficulté que les petits entrepreneurs ont à partir et à maintenir à flot leur entreprise, étant proprement torpillés par la paperasse. Il y a aussi l'absence de concurrence dans bon nombre de secteurs proprement étranglés par les monopoles syndicaux sous prétexte que cela évite les conflits sociaux, comme dans la construction, où le sabotage et les jambes cassées étaient monnaie courante dans les années 70. En fait, les seules raisons justifiant les monopoles syndicaux sont le goût du pouvoir et le fait que cette industrie rapporte plus de 400 millions de dollars en cotisations chaque année. Le maintien des privilèges, qui se fait au détriment de ceux qui pourraient très bien se passer du syndicat pour progresser dans leur carrière, assure la continuité de ce système du côté des travailleurs. Plusieurs questions mériteraient ici d'être posées: Quel est l'impact de cette incessante intervention de l'État sur la productivité des entreprises, dont dépend le niveau de salaire versé? (Et non pas de la présence ou non de syndicats, comme une certaine propagande voudrait nous le faire croire.) Quel est l'impact des différents obstacles juridiques et réglementaires mis de l'avant par l'État? Nuisent-ils ou aident-ils à la création et à la croissance des entreprises, et donc des emplois? Jusqu'à quel point les programmes sociaux ne nuisent-ils pas plus qu'ils aident à une baisse de la pauvreté? Et les subventions à gauche et à droite, qui irritent nos partenaires étrangers, jusqu'où camouflent-elles les problèmes structurels des entreprises et de l'économie? Comment se fait-il que le tiers des adolescents ne finissent pas leurs études secondaires, alors que plus de 70% des emplois créés aujourd'hui nécessitent au moins une formation technique? Lorsqu'un député, un journaliste ou un groupe de citoyens osent poser une question comme celles qui précèdent, qui remettent en cause les acquis de l'un ou l'autre lobby, ou le rôle d'homme de paille du gouvernement, de braves lobbyistes se lèvent pour insulter ou dénigrer le détracteur, lui fourrer dans la bouche quelque étude plus ou moins complaisante sur la situation ou le menacer plus ou moins explicitement. Exactement ce qui est arrivé depuis l'an dernier, ce qui a permis désamorcer toute remise en question lors de l'actuelle campagne électorale.
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