Coûte
que coûte
Depuis que nos élus ont entrepris de faire disparaître la
cigarette de nos vies, une véritable « industrie
de l'aide » s'est développée. Les différents
paliers de gouvernements offrent maintenant de multiples programmes et
mesures visant à accompagner le fumeur dans son long périple
vers une vie sans fumée. Mises à part les patches, dont le
coût est maintenant couvert par les régimes d'assurance-maladie,
des groupes d'aide se sont formés, des médecins ont été
mobilisés et des campagnes de publicités ont été
lancées – on ne badine pas avec la santé. Justement, ces
jours-ci, on peut voir cette publicité en grande rotation à
la télé:
Un
homme entre dans une cuisine. Il avance vers une table et y pose une boîte
à outils.
Lui:
Chérie? J'arrête de fumer.
Une
voix: Encore.
Lui:
Mais là (Il ouvre la boîte...), j'ai trois outils pour m'aider.
(...et en sort un téléphone.) Le téléphone
pour parler à des spécialistes.
Une
voix: C'est pas compliqué!
Lui:
(Il en sort un portable.) Internet, y'a un site pour m'encourager à
persévérer.
Une
voix: C'est pratique!
Lui:
Si je veux (Il regarde à l'intérieur de la boîte.),
je peux même rencontrer un professionnel dans un Centre d'abandon
du tabagisme. (Une « professionnelle » sort de
la boîte et lui sert la main.)
Une
voix: Combien ça coûte tout ça?
Lui:
(L'air fier) C'est gratuit!
La
voix hors champ d'une autre femme dit: « Arrêter
de fumer et réussir? Oui, c'est possible. 1-888-853-6666.
» L'expression « J'arrête! »
apparaît à l'écran ainsi que l'adresse
internet, le numéro de téléphone et les logos de la
Société canadienne du cancer, du Conseil québécois
sur le tabac et la santé et du gouvernement du Québec.
« C'est gratuit! » Ah l'expression magique! Toutes
ces lignes téléphoniques avec des dizaines de spécialistes
au bout ne coûtent rien. Le site internet qui vous encourage à
persévérer s'est fait tout seul, sa mise en ligne n'a rien
coûté et personne ne s'en occupe. Tous ces professionnels
oeuvrant dans les « Centres d'abandon du tabagisme
» le font bénévolement et les édifices
dans lesquels se prodiguent ces soins ont été offerts gracieusement
par un riche et anonyme mécène qui n'en a que pour les non-fumeurs.
Et le soleil tourne autour de la Terre...
Si cette initiative avait été lancée par une entreprise
privée, celle-ci aurait été poursuivie pour «
fausse publicité ». Comme dirait Robert
A. Heinlein, « There ain't no such thing as a free lunch!
» Tout a un prix. Clamer la gratuité, c'est induire
les téléspectateurs en erreur. Comme la majorité d'entre
eux sont des payeurs de taxes, à la question: « Combien
ça coûte tout ça? », le type aurait
dû répondre: « Je ne le sais pas, c'est
la collectivité qui paie! » – ou quelque chose
comme ça. Mais sans doute aurait-ce été moins vendeur...
Les Centres d'abandon du tabagisme offrent un ensemble de services de «
cessation tabagique », tels que les rencontres
individuelles ou en groupe, dispensés par des intervenants formés
à cet effet. Toutes les personnes qui en font la demande ont accès
« gratuitement » à ces services. «
Centres d'abandon du tabagisme », services de
« cessation tabagique », mais qui
invente ces termes? Ça fait vaguement orwellien comme terminologie.
Un tantinet totalitaire.
Gras
saturé
Cesser de fumer a déjà été une simple question
de volonté. On se levait un bon matin et on se disait: «
Bon, c'est aujourd'hui que ça se passe! »
Plus maintenant. Comme nous vivons à une époque d'extrêmes,
et que tout est extrêmement difficile à faire tout seul, le
moindre effort requiert maintenant l'aide de professionnels de la santé.
Le lien entre la cigarette et la nourriture n'est pas compliqué
à établir.
Récemment, Le Grand journal de TQS a consacré une
émission à l'obésité. Lors de la portion «
ligne ouverte », une jeune femme a tenu ces propos
(en substance): « C'est très dur de perdre du
poids. Et ça coûte très cher. Tous les produits "santé"
coûtent plus cher que les produits "ordinaires" et l'abonnement au
gym n'est pas donné. On devrait subventionner les gens pour les
aider à perdre du poids. » (suggestion que l'animateur
Gilles Proulx s'est heureusement empressé de ridiculiser).
Il s'agit de l'opinion d'une téléspectatrice, vous me direz.
Mais le réflexe est là. Et si l'obésité est
une maladie – ce qu'on tente de plus en plus de prouver – et que les obèses
sont des victimes de l'industrie de l'alimentation – comme ne cessent de
le répéter les fanatiques de la santé publique –,
nul doute que les professionnels du lobby sont déjà à
l'oeuvre pour amener nos élus à débloquer des fonds
publics pour accompagner les citoyens dans leur pénible périple
vers la perte de poids.
« Comme nous vivons à une époque d'extrêmes,
et que tout est extrêmement difficile à faire tout seul, le
moindre effort requiert maintenant l'aide de professionnels de la santé.
Le lien entre la cigarette et la nourriture n'est pas compliqué
à établir. » |
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Selon les chiffres officiels, il y aurait plus d'un milliard d'obèses
dans le monde. Près de la moitié des Canadiens auraient un
problème de poids. Le taux d'obésité aurait doublé
chez les femmes en 15 ans. C'est pourtant pas compliqué: tant et
aussi longtemps qu'on ingère plus de calories qu'on en dépense...
on prend du poids. On engraisse (drôle de voir comment ce terme semble
être disparu du lexique).
Une dame qui participait récemment à un symposium sur l'obésité
à Montréal, Dr Marielle Ledoux de l'Université de
Montréal, disait que pour réussir à prévenir
l'obésité, il va falloir « une approche
globale du gouvernement, du système de santé, de l'industrie,
des médias, du voisinage, de l'environnement. »
(La Presse, 28 septembre 2003) C'est pour dire. L'heure est grave...
Comment voulez-vous qu'une personne puisse surmonter un tel problème
toute seule! Il faut une concertation de tous les milieux pour l'épauler!
Passer des soirées entières devant le petit écran
à manger des sacs de biscuits Oreo ou des croustilles (aussi légères
soient-elles) fait engraisser. Manger des muffins (fat sponges)
ou de gros déjeuners oeufs-bacon-rôties à tous les
matins fait engraisser. Manger de gros repas entrée-plat principal-dessert
le midi et le soir fait engraisser. Surtout si on ne bouge pas.
Ce n'est pas du rocket science!
Mais on n'est pas obligés, ô surprise!, de manger dix biscuits
à la crème, on peut en prendre deux. Personne ne nous force
à manger du McDonald's tous les jours. Il est socialement accepté
de s'offrir des salades au dîner. Les croustilles Frito-Lay ont beau
être désormais exemptes d'acides gras trans, si on mange un
plein sac et qu'on ne bouge pas... Idem avec les produits «
légers », ce n'est pas parce qu'ils sont légers
qu'on peut en manger deux fois plus!
Si on vivait dans un régime communiste où il n'y aurait que
du pain, des patates et du « fromage » Velveeta
de Kraft, on pourrait comprendre que des gens aient des problèmes
de poids ou qu'ils entretiennent de mauvaises habitudes alimentaires. On
ne se surprendrait même pas de voir des « élus »
forcer les « fournisseurs officiels » à offrir des produits
faibles en gras. Mais ce n'est pas le cas. Nous n'avons jamais eu accès
à autant de produits de qualité en provenance des quatre
coins du monde. On peut vivre sans poutine, pizza, Whippet, McDo, Fritos,
Coke, etc.
Comme
si vous y étiez
Le discours des interventionnistes collectivistes veut que les coach
potatoes soient un fardeau pour la société. Qu'ils
monopolisent – ou monopoliserons – plus de soins de santé que la
moyenne et qu'ils, par conséquent, coûteront plus cher à
« soigner ». Il faut donc changer les mentalités
et faire... de la prévention. Quoi de mieux que des campagnes de
sensibilisation et des mesures d'aide à la population pour cela!
Bientôt au petit écran:
Une
femme entre dans une cuisine. Elle avance vers la table et y pose son sac
à main.
Elle:
Minou, j'ai décidé de perdre du poids.
Une
voix: Encore.
Elle:
Mais là (Elle ouvre son sac...), j'ai trois outils pour m'aider.
(...et en sort un téléphone.) Le téléphone
pour parler à des spécialistes.
Une
voix: C'est pas compliqué!
Elle:
(Elle sort un portable.) Internet, y'a un site pour m'encourager à
persévérer.
Une
voix: C'est pratique!
Elle:
Si je veux (Elle regarde à l'intérieur de son sac.), je peux
même rencontrer une professionnelle dans un Centre de perte de poids.
(Une « professionnelle » sort de la boîte
et lui sert la main.)
Une
voix: Combien ça coûte tout ça?
Elle:
(L'air fière) C'est gratuit!
La
voix hors champ d'une autre femme dit: « Perdre du poids
et réussir? Oui, c'est possible. 1-888-853-6666. »
L'expression « J'en perd, je gagne! »
apparaît à l'écran ainsi que l'adresse internet, le
numéro de téléphone et les logos de la Société
canadienne des diététistes, de la Fondation des maladies
du coeur et du gouvernement du Québec.
Si au moins ces « crises » de santé publique
ne touchaient que les entreprises « fautives »
et les avocats qui les poursuivent, on pourrait se dire que c'est passager
et les ignorer. Mais ce n'est pas le cas. Elles ont la fâcheuse habitude
d'être récupérée par le politique qui immanquablement
met en branle des trains de mesures pour venir en aide aux «
victimes ». Quelle est la prochaine étape? Les coûts
de la chirurgie de dégraissage ou de brochage d'estomac couverts
par l'État?
On ne peut forcer quelqu'un à être en santé. C'est
sa responsabilité. Le problème avec de telles interventions
de l'État – dans des « champs de compétence
» qui ne le regardent pas –, c'est que tous les payeurs
de taxes, qu'ils n'aient jamais touché à une cigarette de
leur vie ou qu'ils se soient toujours préoccupés de maintenir
un poids-santé, doivent payer pour tous ceux qui ne s'en sont jamais
souciés. Le citoyen qui souhaite perdre du poids ou cesser de fumer
peut très bien le faire actuellement avec les outils qui lui sont
offerts sur le marché. Qu'on le laisse donc s'en occuper lui-même.
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