La
fermeture pour cause d'activité syndicale d'un restaurant McDonald's
à Saint-Hubert a provoqué certaines réactions prévisibles.
De la caricature digne des Nouvelles CSN dans le Devoir en passant
par la proposition du leader de la FTQ d'utiliser le capital de risque
du Fonds de solidarité (capital largement subventionné par
l'État aux moyens de généreuses déductions
fiscales) pour relancer l'emploi dans cette entreprise de «
haute technologie », le verdict de la plupart
des faiseurs d'opinion a été sans appel: une multinationale
contre une poignée de jeunes, David contre Goliath, le mépris
des exploitants contre des employés sans défense. Pour reprendre
un éditorial du Devoir, la chaîne McDonald's est devenue
la « honte du monde patronal » à
cause de sa « grande vulnérabilité devant
le changement ».
Des revendications salariales d'abord
Bien que les médias aient peu parlé des motivations de la
soixantaine de jeunes employés mis a pied, on peut croire que leurs
revendications touchaient les salaires bien plus que la sécurite
au travail. Après tout, même si les conditions de travail
chez McDonald's sont difficiles, on ne peut pas dire qu'elles portent atteinte
à l'intégrite physique des travailleurs. On peut toutefois
se demander ce qu'un syndicat (même en employant les tactiques usuelles
des Teamsters qui étaient derrière les jeunes employés)
aurait pu faire pour hausser les salaires.
Ce qui dépasse le plus souvent les syndicalistes militants est qu'il
y a de la vie hors des murs de leur entreprise et que bien d'autres facteurs
que les rapports de force internes déterminent le prix de la main-d'oeuvre.
Les salaires des travailleurs sont en bout de ligne déterminés
par leur productivité, ou pour dire les choses autrement, par ce
que les consommateurs sont prêts à payer pour leur production
et par la compétition que se livrent les employeurs pour embaucher
de la main-d'oeuvre.
On peut illustrer ces arguments en remarquant que personne ne croit que
les « exploiteurs capitalistes »
ne paient pas un juste prix pour utiliser de la machinerie. A-t-on toutefois
déjà vu un syndicat de presses hydrauliques? Les machines
n'ont pas besoin de se syndiquer pour que les entreprises paient le juste
prix pour s'en procurer et les « exploiter ».
Nos tenants de la syndicalisation postulent néanmoins qu'il n'en
va pas de même de la rémunération des ouvriers, d'où
la nécessité de leur intervention. Et pourtant, à
la fin du XIXe siècle, les salaires moyens des travailleurs étaient
beaucoup plus élevés aux États-Unis qu'en Allemagne
ou en Angleterre, pays où le mouvement syndical était beaucoup
plus important. Pourquoi? Tout simplement parce que les entrepreneurs américains
étaient beaucoup plus libres de créer de la richesse que
leurs confrères européens et que la compétition qu'ils
se livraient pour embaucher de la main-d'oeuvre faisait monter le niveau
des salaires.
McDonald's doit suivre les lois du marché
Même la puissante multinationale McDonald's ne peut se dérober
aux lois du marché. C'est ainsi qu'au Massachusetts au début
des années 1980, le bas taux de chômage de cette région
obligea la « honte du monde patronal »
à offrir deux fois le salaire minimum légal pour se trouver
des employés. Si les salaires dans les McDonald's québécois
sont si faibles en comparaison, c'est que l'économie québécoise
ne cesse de prendre du retard face au reste de l'économie nord-américaine.
La meilleure façon de hausser les salaires des employés de
McDonald's est de prendre des mesures drastiques pour rendre notre économie
plus productive. Les législations gouvernementales et l'action syndicale
ne pourront jamais redistribuer une
richesse que l'on ne crée pas.
Pierre Desrochers
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