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À la fin des années soixante-dix, il y a très peu de stations de radio sur la bande MF qui diffusent de la musique québécoise (CKOI, CIEL et CHOM sont parmi les rares). La plupart des gros noms enregistrent sur d'importantes étiquettes américaines (A&M, CBS, etc.), les autres, sur de plus petites (Kébec-Disc, Célébration, Trans-Canada, etc.). Le vidéoclip n'existe pas encore et les concerts demeurent le meilleur outil de promotion pour l'artiste – concerts qu'ils donnent la plupart du temps dans des salles plus ou moins bien aménagées pour l'acoustique. C'est l'époque où il est difficile de se tailler une place sur le marché. Il y a moins de joueurs, mais en revanche une plus grande diversité dans les genres. Un musicien doit jouer plus longtemps dans le réseau des bars avant d'en sortir et connaître une certaine renommée. Les disques sont réalisés de façon plus artisanale – ce qui donne parfois une qualité sonore qui laisse à désirer. Malgré tout, plusieurs réussirent à se faire un nom. Avec le recul, il est difficile de définir tous les facteurs qui ont fait que notre musique était dynamique et qu'un marché existait pour la soutenir. Chose certaine, le domaine du disque et du spectacle n'ayant pas bénéficié d'aide publique avant 1983, on ne peut en attribuer le mérite à une aide gouvernementale. ...elles volent plus haut que les oiseaux(2) Aujourd'hui, le milieu de la chanson francophone québécoise est l'un des plus réglementés et des plus protégés sur le continent. Impossible d'ouvrir la radio sans entendre les mêmes chansons sur l'ensemble des stations – de même qu'il est difficile d'ouvrir la télé sans y voir les mêmes artistes, défiler d'une émission à l'autre, quand vient le temps de faire leurs tournées de promotion. Après quinze ans d'interventionnisme, tous ces artistes font sensiblement la même chose: une musique qu'on pourrait qualifier de passe-partout. De CFGL à CITÉ en passant par CKOI et CIEL, les résidants de la grande région métropolitaine ont accès à un contenu uniforme de musique québécoise et française qui plaît autant à maman qu'à fiston. À part quelques rares exceptions (Les Colocs, Noir Silence, Les Frères à ch'val, etc.) qui tournent dans des radios plus alternatives, la majorité des genres musicaux produits aujourd'hui plaisent à une très large fraction de la population.
Peut-on parler de progrès? Si l'on en croit les intervenants du
milieu, il resterait encore beaucoup de chemin à faire pour améliorer
la situation. Selon les membres du groupe de travail, l'industrie de la
chanson québécoise est malade et ce n'est pas de la faute
des artistes s'ils ne sont pas aussi populaires qu'ils le devraient. Ils
font face à un manque de fonds, un manque de ressources techniques,
une concurrence déloyale de la part de
Il sont en manque et leurs admirateurs se font de plus en plus rares. Citée
par le groupe de travail, une étude menée par Monique Caron-Bouchard(3),
révèle que Mme Caron-Bouchard et ses collègues devraient ouvrir leur téléviseur plus souvent! Car il s'agit de regarder un tant soit peu les talk-shows (Poing J, L'Écuyer, etc.), les émissions plus spécialisées (Flash, Les Choix de Sophie, etc.) et même les bulletins de nouvelles pour se rendre compte que ce n'est pas la promotion qui manque. Tout le monde plogue constamment tout! Ça en est parfois indécent. Quand ce n'est pas l'artiste qui plogue son produit, ce sont les chaînes de télévision ou les quotidiens qui les commanditent qui le font. Tout petit, tout petit...
Si on assiste à un
La musique anglaise ou américaine attire les foules parce qu'elle
ne se prend pas au sérieux. Contrairement à notre chanson
à qui l'on prête souvent une multitude d'intentions – tantôt
un outil
La création d'une chanson est un geste spontané, et non un
geste calculé qu'il faut encadrer et soupeser par une lourde structure
bureaucratique et une armée de fonctionnaires et de
Quand on parle de stimuler, de soutenir, de favoriser, d'encourager, de
sensibiliser, d'encadrer ou de consolider une industrie, c'est que cette
industrie est perçue comme faible et malade. Cessons de la considérer
de cette façon et peut-être aurons-nous plus naturellement
envie de la consommer. Personne ne veut être associé à
quelque chose qui semble trop Vivre et laisser vivre L'État doit se retirer du milieu de la chanson et cesser d'imposer ses mesures protectionnistes s'il veut que ce secteur s'épanouisse davantage ici comme à l'étranger. Le retrait des subventions ne garantit pas un meilleur produit, mais sans elles, toute une catégorie d'artistes mineurs ne viendraient pas brouiller les cartes. À défaut d'avoir un grand nombre d'artistes, nous aurions une industrie plus performante. Less is more. Et nous ne serions pas plus mal en point si des artistes comme Martine St-Clair (Lavez, lavez), Françis Martin (Quand on se donne – à une femme d'expérience) ou la formation Bill (As-tu du feu? Non, j'ai du beurre de peanut) n'avaient jamais percé le marché... le temps de quelques chansons. Par contre, des artistes comme Daniel Bélanger, Kevin Parent, Laurence Jalbert ou Térez Montcalm auraient sans doute réussi à percer même sans subvention. Après tout, si des géants de la chanson québécoise comme Robert Charlebois, Diane Dufresne, Claude Dubois, Beau Dommage, Harmonium et j'en passe, ont tous connu leur moment de gloire avant que les gouvernements n'interviennent, pourquoi ne le pourraient-ils pas? Sans quota, l'avenir de la musique francophone ne serait pas compromis comme plusieurs veulent bien nous le faire croire. Les stations de radio sont les mieux placées pour décider des genres musicaux qu'elles veulent privilégiés et les consommateurs, pour décider de la station de radio qu'ils veulent syntoniser. S'il y a un marché pour une chanson québécoise, il saura trouver une façon de s'adapter et de s'imposer. Laissons au citoyen le choix de rémunérer l'artiste qu'il préfère en achetant ses disques et en allant voir ses spectacles. Sans l'interventionnisme des gouvernements, les entreprises de distribution et de production de disques feraient tout en leur pouvoir pour veiller à ce que leurs investissements fructifient. Sans systèmes de subventions, elles redoubleraient obligatoirement d'astuces pour vendre les artistes de leur catalogue – sans quoi, d'autres compagnies plus dynamiques s'en occuperaient. Libérés de tous ces niveaux de réglementations, les artistes québécois réussiraient à se concentrer sur leurs créations, à se démarquer et à atteindre leur plein potentiel commercial.
Quand les membres d'un groupe de travail comme celui sur la chanson recommandent
Laissons les intervenants du milieu crier au génocide culturel,
les menaces de disparition du peuple québécois se multiplier
et les idées de grandeur d'une ministre qui tente de se tailler
une place dans les livres d'histoire s'écrouler. En bout de ligne,
lorsque les nuages se dissiperont, nous auront une industrie de la chanson
beaucoup plus forte et plus dynamique.
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