Montréal,
le 26 juin 1999 |
Numéro
40
|
(page 10) |
page précédente
Vos
commentaires
|
DÉBAT
POUR OU CONTRE LE DÉMANTÈLEMENT
D'HYDRO-QUÉBEC?
Le mouvement de privatisation des monopoles d'État et de déréglementation
des marchés d'électricité s'étend un peu partout
en Amérique du Nord. Ce débat ne suscite encore que peu d'intérêt
chez nous, où Hydro-Québec fait toujours figure de symbole
national intouchable.
Dans un numéro spécial
consacré au Québec, la revue française Cadres,
publiée par l'Union confédérale des ingénieurs
et cadres CFDT, s'est penchée sur la question. Sa rédactrice
en chef, Mme Marie-Noëlle Auberger, a confronté les opinions
de Jean-Marc Pelletier, président du Syndicat des chercheurs d'Hydro-Québec
et défenseur d'un monopole nationalisé, avec ceux de Martin
Masse, directeur du QL et partisan de la privatisation et de la
déréglementation.
Nous reproduisons ici cet article pour le bénéfice de nos
lecteurs avec l'aimable autorisation de l'auteure. Précisons qu'il
n'existe aucun lien entre le QL et la revue Cadres. |
|
HYDRO-QUÉBEC: ENTRETIENS
AVEC
JEAN-MARC PELLETIER ET MARTIN
MASSE
par Marie-Noëlle Auberger
L'industrie de l'électricité, qui exige des investissements
lourds et bénéficie d'économies d'échelle,
a dès sa création été dominée par de
grandes entreprises, en général intégrées verticalement
(production, transport à haute tension, distribution aux consommateurs).
En Amérique du Nord, ces compagnies ont le plus souvent été
dotées de « territoires de services exclusifs
» à l'intérieur desquels elles ont le droit
et l'obligation de fournir de l'électricité à tous
(monopole) à des tarifs fixés par des « agences
réglementaires » (service public). Aujourd'hui,
la déréglementation venue des États-Unis gagne le
Canada mais le Québec maintient une entreprise nationalisée
dont le monopole n'est entamé qu'assez théoriquement et hésite
à propos de la nature du lien à garder entre pouvoir gouvernemental
et opérateur électrique.
Au Québec, Hydro-Québec est une compagnie d'électricité
verticalement intégrée, détenant jusqu'à très
récemment un monopole sur la distribution et le transport. Son énergie
est à 97 % hydraulique (un pour cent pour une petite centrale nucléaire
et deux pour cent pour quelques centrales au mazout).
À côté, il y a quelques producteurs privés qui
lui vendent leur production et des autoproducteurs industriels (qui consomment
leur production) ainsi que neuf distributeurs municipaux et une coopérative,
qui achètent l'essentiel de leur électricité à
Hydro-Québec avant de la redistribuer. Cette situation provient
de la nationalisation de l'électricité faite dans les années
soixante, quand les entreprises électriques opérant sur le
territoire du Québec ont été nationalisées
et rétrocédées à Hydro-Québec.
La nationalisation québécoise
« Cela n'a pas été facile de faire la
nationalisation au Québec. L'Ontario avait nationalisé bien
avant, dès les années vingt, mais c'étaient des anglophones
qui nationalisaient des anglophones. Au Québec, depuis la conquête
anglaise, l'élite économique était anglophone et méprisante.
L'électricité québécoise appartenait à
des sociétés privées anglophones qui expliquaient
que les francophones conduiraient l'électricité à
une catastrophe économique » raconte Jean-Marc
Pelletier, président du SPSI, le syndicat des chercheurs d'Hydro-Québec.
« Hydro-Québec existe depuis 1944, c'était
une société d'État, un producteur parmi bien d'autres,
qui représentait environ quinze pour cent de la production électrique
québécoise. L'un des mandats que lui avait donné l'État
était l'électrification des régions rurales, qui avaient
été laissées de côté par les entreprises
privées anglophones. En 1962, René Lévesque, un des
collaborateurs de Jean Lesage, a convaincu celui-ci de faire de la nationalisation
de l'électricité un des enjeux de la campagne électorale.
Quand Lesage est devenu Premier ministre, c'était la “Révolution
tranquille” par laquelle les francophones ont commencé à
reprendre le contrôle des grandes sociétés privées
ou publiques. René Lévesque, devenu ministre des ressources
naturelles, a procédé à la nationalisation des compagnies
d'électricité. » L'Histoire explique ainsi
le caractère un peu particulier de la compagnie électrique
dans la province. « Hydro-Québec, ce n'est pas
seulement un fournisseur de services mais aussi un symbole extrêmement
puissant. La constitution d'une société publique de taille
importante contrôlée par les francophones, c'était
un peu la revanche de ceux-ci sur les anglophones qui les avaient méprisés
pendant deux cents ans. De 1962 jusqu'à aujourd'hui, entre Hydro-Québec,
le gouvernement québécois et le citoyen, il y a une histoire
d'amour. Et cette histoire d'amour perdure, avec quelques chicanes de ménage
bien sûr de temps en temps. »
« Hydro-Québec
fonctionne comme si le territoire du Québec était sa propriété
et comme si les citoyens avaient en contrepartie très peu d'importance.
»
Martin Masse
|
|
Le nouvel Hydro-Québec se voyait confier quatre mandats: l'électrification
de l'ensemble du territoire, la mise en valeur du patrimoine hydroélectrique,
l'établissement d'une tarification uniforme sur tout le territoire,
l'ajustement des tarifs pour couvrir spécifiquement les coûts
d'investissement et d'opération.
Certaines grandes sociétés comme Alcan qui avaient obtenu
des concessions de rivière pour faire de l'autoproduction n'ont
pas été nationalisées. En 1991, des producteurs privés
ont été autorisés à construire des barrages.
Hydro-Québec achète la production, l'achemine et le revend,
à perte affirme-t-il.
Le principe du timbre-poste
Hydro-Québec pratique la même tarification quelle que soit
l'implantation géographique du consommateur (principe dit «
du timbre-poste »). Ce n'était pas le
cas avant la nationalisation, les habitants des villages de Gaspésie
en bout de ligne payaient leur kilowatt/heure cinq fois plus cher que les
Montréalais. Les partisans de la loi du marché sont conscients
que la « vérité des prix »
conduirait à un très fort renchérissement de l'électricité
loin des sites de production et des zones à forte densité
de la vallée du Saint-Laurent, mais considèrent que «
la politique énergétique ne doit plus être utilisée
comme une sorte de subvention pour les habitants des régions éloignées.
Ceux-ci doivent vivre avec les conséquences de leur choix: profiter
des avantages de leur région mais aussi payer plus cher ce qui coûte
plus cher. » En 1966, une tentative de distinguer entre
clients résidents « ordinaires » et ceux
« engendrant des coûts prohibitifs »
a tourné court sous la pression de l'opinion publique.
Catégories tarifaires et interfinancement
Il y a quatre catégories de tarifs: résidents (particuliers),
commerciaux, petite industrie, grande industrie. Y a-t-il «
interfinancement » c'est-à-dire sur-paiement par rapport
au coût pour certaines catégories et sous-paiement pour d'autres?
Jean-Marc Pelletier est nuancé « il n'y a pas
beaucoup d'interfinancement entre les différentes catégories.
Les entreprises disent qu'elles payent pour les résidents, même
si c'était vrai cela ne serait pas choquant. Puisque c'est le citoyen
qui supporte la dette d'Hydro-Québec, il est normal qu'il se fasse
à lui-même, en tant que propriétaire, un tarif intéressant
». Des tarifs bas pour les gros consommateurs d'énergie
correspondent de fait à une aide aux secteurs de l'aluminium et
de la pâte à papier, qui furent stratégiques pour le
Québec mais ne le sont plus autant. « Voici dix
ans, le gouvernement a proposé des tarifs exceptionnellement bas
à certaines entreprises, essentiellement des aluminiers, dont Péchiney,
théoriquement pour créer de l'emploi entre Québec
et Montréal » commente Jean-Marc Pelletier. «
Des tarifs tellement exceptionnels qu'ils sont gardés secrets.
Mais nous sommes sûrs que ces “contrats secrets” ont été
signés en dessous du coût de production, et il est généralement
admis qu'en dix ans, ils ont coûté un milliard de dollars
à Hydro-Québec. Et le gouvernement songe à relancer
un programme de contrats particuliers, toujours sous le prétexte
que cela créera de l'emploi. Mais le bilan emploi versus financement
n'est pas bon. Dorénavant, ces décisions doivent être
autorisées par la Régie, ce qui ennuie le gouvernement.
»
Un État dans l'État ?
Pour Martin Masse, du Québécois libre, une publication
électronique bimensuelle ne jurant que par les mécanismes
de marché et le « moins d'État »,
Hydro-Québec est un « État dans l'État
», à cause de son pouvoir sur le Gouvernement. «
D'un point de vue libertarien (ou libéral, le terme le plus
souvent utilisé encore en France), le problème majeur en
ce qui concerne Hydro-Québec est évidemment qu'il s'agit
d'un immense monopole, très puissant, très bureaucratique
et centralisé, et où les mécanismes du marché
ne fonctionnent à peu près pas. Hydro-Québec fonctionne
comme si le territoire du Québec était sa propriété
et comme si les citoyens avaient en contrepartie très peu d'importance.
Bien souvent, ce sont les tribunaux qui mettent un terme à des projets
de développement, parce que HQ n'a pas respecté les processus
de consultation mis en place par le gouvernement ou fait fi de la propriété
privée. » Pour J.-M. Pelletier, la situation
est plus subtile: « Hydro-Québec, un État
dans l'État? C'est vrai jusqu'à un certain point. Quand Hydro-Québec
désinvestit, toute l'économie québécoise s'en
ressent. » Pour lui, Hydro-Québec et le gouvernement
provincial sont historiquement liés, mais la création de
la Régie de l'énergie permet un contrôle de l'électricien
par la société (voir infra).
La dérégulation nord-américaine
Un grand débat a lieu en Amérique du Nord à propos
de la structure des marchés de l'électricité, la démonopolisation
et une plus grande intégration continentale sont dans l'air du temps.
L'intérêt pour la déréglementation est particulièrement
fort dans les États où les tarifs sont élevés
(les centrales nucléaires construites des années soixante
aux années quatre-vingt ont des coûts de production supérieurs
à ceux des turbines à gaz naturel bâties dans les années
quatre-vingt-dix). Par le Energy Polity Act de 1992, le Congrès
étatsunien a mandaté la FERC (Federal Energy Regulatoy
Commission), un organisme fédéral qui a compétence
sur le marché de gros de l'électricité (les ventes
au détail sont réglementées au niveau des États),
pour mettre en place un système d'accès ouvert (open acess:
accès des producteurs indépendants au réseau de transport
d'électricité) au niveau de gros pour tous les États-Unis.
Ceci fut fait en mai 1996 et depuis tout exploitant d'un réseau
de transport aux États-Unis doit publier tarifs et modalités
permettant l'accès ouvert et non discriminatoire à son réseau.
Pour le marché de détail, la mise en concurrence et l'accès
ouvert se réglementent à l'intérieur de chaque État.
La FERC pouvant définir les conditions auxquelles les compagnies
étrangères pourront intervenir sur son marché, la
restructuration étatsunienne est une forte incitation aux provinces
canadiennes à suivre la même démarche. Le président
d'Hydro-Québec, André Caillé, a convaincu le gouvernement
québécois que la déréglementation était
inévitable: pour que Hydro-Québec et ses filiales vendent
de l'électricité sur les marchés de détail
aux États-Unis, le marché québécois de détail
devra aussi être ouvert à la concurrence. Le 11 décembre
1996, le gouvernement québécois adoptait le règlement
652 permettant l'accès du réseau de transport d'Hydro-Québec
à tous les producteurs d'énergie d'Amérique du Nord.
D'autres compagnies peuvent donc emprunter le réseau québécois,
mais les coûts de production de l'hydro-électricité
québécoise sont tels que les concurrents ne se bousculent
pas. Hydro-Québec n'a pas demandé sa privatisation, mais
la question a été posée.
Retour à la privatisation ?
Pour Martin Masse, il faut « privatiser et démanteler
HQ », à la fois pour casser la puissance de l'État
dans l'État et pour faire jouer la concurrence interne: «
D'abord, mettre fin aux abus décrits. Ensuite, injecter des
notions de concurrence, de vérité des prix, de diversification
des sources d'énergie, et d'incitation à la recherche de
nouvelles technologies dans le marché de l'énergie au Québec.
»
A l'inverse, Léo-Paul Lauzon, titulaire de la chaire d'études
socio-économiques de l'UQAM (Université du Québec
à Montréal), s'insurge sur le thème «
Ne touchez pas à Hydro-Québec! »
et proteste: « Jamais on entend un ministre faire l'éloge
d'Hydro-Québec. Pourtant, c'est une grande richesse et un formidable
outil de développement! » Il continue: «
Oui, il faut se débarrasser des carriéristes qui pillent
Hydro-Québec avec leurs folles dépenses. Mais attention!
Le tapage qu'on fait autour d'un certain laxisme cache une menace beaucoup
plus dangereuse: la privatisation. En cognant à bras raccourcis
sur les gestionnaires d'Hydro, nos politiciens tombent dans le piège
des pillards qui rêvent de la privatiser. » Pour
lui et les partisans d'un Hydro-Québec monopolistique et public,
l'entreprise électrique rapporte beaucoup d'argent, non seulement
à l'État (paiement de taxes de toutes sortes, taxes municipales),
mais au développement économique (tarifs les plus bas d'Amérique
du Nord, tarifs spéciaux pour les alumineries et le secteur des
pâtes et papiers) et à la collectivité dans son ensemble
(encouragement du développement régional par ses investissements
et sa tarification; investissement dans la recherche-développement;
respect de normes environnementales rigoureuses).
« Il n'y a pas
de grande société francophone en dehors d'Hydro-Québec.
Privatiser Hydro, ce serait renier la revanche sur l'anglophone.
»
Jean-Marc Pelletier
|
|
Si la privatisation des centrales ne pose pas de problèmes techniques
(« seulement » des problèmes politiques),
celle du réseau de distribution est, comme partout, plus délicate.
Même les plus acharnés tenants de la concurrence absolue ne
préconisent pas que chaque compagnie double les lignes de transmission.
« Dans la plupart des États où on discute
de déréglementation, on débat aussi à savoir
si ce réseau devrait rester un monopole public ouvert à tous
les producteurs, où si l'on pourrait aussi vendre des bouts de réseau
à des entrepreneurs privés » dit Martin
Masse. « Peut-être une période de transition
pendant laquelle le réseau sera considéré comme “public”
est-elle nécessaire pour permettre à tous les producteurs
de faire partie du marché de l'énergie. »
Cependant, les partisans de la privatisation pure et dure la croient possible
à terme. « Mais à plus long terme, rien
n'empêche une privatisation totale du réseau. Ce réseau
coûte très cher à construire et à entretenir
(la construction de nouvelles lignes oblige à des expropriations
massives) mais ces coûts ne sont pas reflétés dans
les coûts de l'électricité aujourd'hui à cause
du monopole d'HQ et de son pouvoir excessif d'expropriation. Si le réseau
était privé, toute nouvelle construction de ligne devrait
tenir compte des coûts réels, sans le bras coercitif de l'État
pour venir appuyer une décision bureaucratique imposée aux
citoyens affectés. Si ces coûts réels étaient
pris en compte, il y aurait une forte incitation à trouver des moyens
alternatifs de transmission de l'électricité (ce qui s'est
fait dans le cas du téléphone où il y a une concurrence
mais pas dans celui de l'électricité parce que ce n'était
pas nécessaire). Il y aurait plutôt une tendance à
construire de petites centrales près de la clientèle, plutôt
que de gigantesques centrales très éloignées. Bref,
on ferait tout pour minimiser les coûts, ce qui n'a jamais été
une grande préoccupation au Québec, notamment avec les gigantesques
projets du Nord. » « On parle très
peu aujourd'hui de privatisation au Québec »,
estime Jean-Marc Pelletier « le débat est mort
de lui-même. Hydro-Québec fait des tarifs bas et un service
excellent. Et il y a toujours cette histoire d'amour, ce lien d'identification.
Il n'y a pas de grande société francophone en dehors d'Hydro-Québec.
Privatiser Hydro, ce serait renier la revanche sur l'anglophone.
»
La Régie de l'énergie
Parallèlement à la fin du monopole du grossiste, le gouvernement
a créé la Régie de l'énergie, qui s'inspire
de ce qui se fait aux Etats-Unis depuis quatre-vingt ans, au moment même
où ce pays tend à les faire disparaître. Jusqu'alors,
lorsque HQ voulait construire un nouveau barrage ou modifier ses tarifs,
la décision était prise par le gouvernement; depuis la création
de la Régie, celle-ci a théoriquement pleine juridiction,
tant en matière de nouveaux projets que d'ajustements tarifaires.
Son président, Jean Guérin, est l'ancien président
de la société de gaz (de statut privé mais contrôlée
majoritairement par l'Etat, et dont GDF possède 25 % du capital).
LA MISSION DE LA REGIE
DE L'ENERGIE
« La Régie de l'énergie est un organisme
de régulation économique dont la mission consiste à
favoriser la satisfaction des besoins énergétiques des consommateurs
québécois, dans une perspective de développement durable,
en tenant compte des préoccupations économiques, sociales
et environnementales tout en assurant le développement ordonné
et rentable de l'industrie énergétique au Québec.
A cette fin, elle fixe les tarifs et conditions de service des distributeurs
de gaz naturel et d'électricité tout en privilégiant
le libre jeu des forces du marché et l'adoption de mesures incitatives
permettant d'améliorer la performance des distributeurs et la satisfaction
des besoins des consommateurs. Elle exerce également un pouvoir
de surveillance sur les prix des produits pétroliers et de la vapeur.
Enfin, la Régie approuve les contrats d'achat, d'échange
et d'exportation d'électricité. Elle fixe également
les tarifs et conditions de service applicables au transport de l'électricité,
élément essentiel à la participation au marché
déréglementé de l'électricité dans le
Nord-Est américain ». (Source: site Web
de la Régie de l'énergie)
« Depuis dix ou quinze ans nous souhaitions une régie
» explique Jean-Marc Pelletier. « Les régisseurs,
nommés pour cinq ans, ont une fonction de juge. La Régie
comporte aussi du personnel clérical (des salariés NDLR).
La Régie se comporte comme un tribunal: quand elle veut étudier
un dossier, elle met un avis dans les journaux, elle invite les représentants
des consommateurs, des groupes de toute sorte,communautaires (associations,
NDLR) mais aussi syndicaux ou environnementalistes,
et choisit parmi eux des intervenants au dossier. Chacun se présente
avec ses experts et ses dossiers, et peut contre-interroger les experts
des autres intervenants. Tout cela sous forme d'audience publique, dont
la durée peut être d'un jour à un mois. Puis la Régie
prend sa décision. Elle a ainsi rendu en 1998 des décisions
qui n'ont pas été complètement appréciées
par le gouvernement et par HQ. En particulier, la Régie a décidé
que pour fixer les tarifs il lui fallait connaître les coûts
réels et pour cela avoir accès aux livres d'HQ on attend
la décision gouvernementale. En 1999, la régie a un comportement
plus cahotique. Certains disent que les régisseurs sont un peu complaisants
vis-à-vis du gouvernement, et que celui-ci pensait pouvoir continuer
à exercer son contrôle. Mais ce n'est pas le cas. Les régisseurs
peuvent être convaincus par ceux qu'ils auditionnent. Et même
si la Régie a pleine juridiction, elle n'en est pas moins soumise
à l'autorité des tribunaux supérieurs, jusqu'à
la Cour Suprême s'il le faut. Aujourd'hui, la bataille fait rage
au sein du gouvernement pour savoir s'il faut ou non laisser les pleins
pouvoirs à la Régie. Mais si le gouvernement modifie la loi
au détriment de la Régie, il risque de perdre la licence
d'exportation aux États-Unis. Certains prétendent que pour
avoir la meilleure qualité de service et les prix les plus bas,
il faut que le marché soit déréglementé et
privatisé. Moi je pense que le mieux c'est une société
d'État, réglementée par une Régie. Toute la
chose électrique sort du giron politique pour aller sous l'égide
d'un tribunal spécialisé où tous les groupes d'intérêt
font valoir leur point de vue. » |
|