Montréal, le 11 septembre 1999 |
Numéro
45
|
(page 11) |
|
|
Le postulat du débat intellectuel chez nous est que la démocratie
représentative est le seul mécanisme capable d’exprimer les
préférences populaires, que les décisions politiques
réalisent automatiquement le bien commun. La proposition centrale
de l’analyse économique de la politique est plutôt que le
mécanisme politique donne lieu à des coalitions majoritaires
successives de votants ayant pour objet exclusif, non pas d’augmenter la
richesse et d’améliorer le bien-être général,
mais d’opérer des prélèvements sur les uns pour octroyer
des transferts au profit de sous-groupes particuliers, fussent-ils majoritaires.
Cette grande sensibilité des politiciens aux préférences
médianes entraîne l’uniformisation du service. Dans une société
où le revenu de la majorité est inférieur au revenu
moyen, c’est en étatisant de vastes pans de l’activité économique
et en recourant au financement public qu’on rallie des majorités.
Mais, la masse des gens ne s’adonne que peu à l’activité politique, parce que la Tentation redistributionniste L’activité politique ne sert principalement qu’à redistribuer la richesse et devient ainsi un jeu à somme négative, puisqu’elle absorbe de gigantesques investissements politiques. La logique politique comporte de ce fait un biais systématique en faveur de la croissance excessive du secteur public et de la centralisation des fonctions, depuis les provinces en faveur d’Ottawa et depuis les administrations locales et régionales en faveur des provinces.
La croissance économique engendre la démocratie, mais la démocratie s’avère plutôt défavorable à la croissance. Ce qui compte dans l’accélération de la croissance, ce n’est pas tant les libertés politiques que les libertés économiques. Le complément de cette réalité troublante est que la démocratie suscite la tentation redistributionniste qui a pour effet de retarder la croissance. On n’a pas les gouvernements qu’on mérite. Le gouvernement est moins vertueux que ne le sont les gens qui l’élisent, parce qu’il repose sur le pouvoir des uns de s’approprier la richesse des autres. La politisation suscite donc les antagonismes et favorise les affrontements. En l’absence de droits de propriété nets, c'est-à-dire là où le pouvoir de monopole et de coercition est conféré aux uns par la puissance publique, l’appât du gain des uns transfère aux autres le fardeau de leur égoïsme. Le marché au contraire, s’il ne saurait exprimer la vertu que seuls les individus possèdent, retire aux égoïstes et aux immoraux le pouvoir de refiler le poids de leurs faiblesses et de leurs dépravations à leurs voisins. Le capitalisme sert donc d’instrument pour minimiser les conséquences de ce que les hommes ne soient pas des saints. La justice sociale consiste dans une société libre, stable et progressive, à sauvegarder les droits de chacun. La tragédie de la morale politique conventionnelle est d’avoir accrédité l’erreur que la justice sociale repose sur la violation des droits de propriété Le corps constitué de la société Le postulat collectiviste de l’homme et de la société colporté par la pensée reçue depuis la révolution tranquille impute une âme distincte à la société, une volonté abstraite, au-dessus des individus qui la composent et capable de faire des Même dans des conditions Il n’existe pas de bons ou de mauvais gouvernements. Il n’existe que des gouvernements qui obéissent aux incitations qui s’exercent sur eux. Il faut viser à changer les règles du jeu qui les régissent plutôt que les gouvernements eux-mêmes. |
sommaire |
|