Montréal, le 11 septembre 1999 |
Numéro
45
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Une analyse praxéologique de l'activité
économique
Bien que L'Action Humaine soit l'un des plus implacables réquisitoires contre l'interventionnisme étatique, son auteur ne traite à peu près pas de l'actualité politique de la fin des années 1940, ou sinon d'une façon universelle, comme dans ses chapitres sur Mises se démarque totalement de ce que l'on enseigne aujourd'hui dans la plupart des départements d'économie, car il rejette sans ambage la mathématisation de l'économie, l'utilisation des grands agrégats et des statistiques économiques (comme le produit intérieur brut), la réduction des êtres humains à des homo oeconomicus désincarnés et les explications en termes de mobiles collectifs (comme par exemple la lutte des classes). Il soutient plutôt la thèse d'un dualisme méthodologique entre les sciences naturelles et les sciences humaines. Il considère donc que les méthodes semblant donner de bons résultats pour étudier les atomes, les composés chimiques ou le mouvements des planètes ne sont pas nécessairement les plus appropriées pour comprendre l'activité humaine et plus particulièrement la sphère économique.
Mises élabore donc dans L'Action Humaine une alternative théorique qu'il nomme La praxéologie ne traite pas du monde extérieur, mais de la conduite de l'homme à son égard. La réalité praxéologique n'est pas l'univers physique, mais la réaction consciente de l'homme à l'état donné de cet univers. L'affaire de l'économie, ce ne sont pas des choses et des objets matériels tangibles; ce sont les hommes, leurs intentions et leurs actions. Les biens, les denrées, la richesse et toutes les autres notions relatives à la conduite ne sont pas des éléments de la nature; ce sont des éléments de signification et de conduite pour les hommes. Celui qui veut s'y intéresser ne doit pas porter son regard sur le monde extérieur; il doit les chercher dans l'intention d'hommes qui agissent.(2). On ne peut donc définir objectivement les La société, c'est l'action concertée, la coopération. La société est issue du comportement conscient et intentionnel. Cela ne signifie pas que les individus aient conclu des contrats en vertu desquels ils auraient fondé la société humaine. Les actions qui ont fait apparaître la coopération sociale et qui la font réapparaître quotidiennement ne visent à rien d'autre que la coopération et l'entraide avec d'autres pour l'obtention de résultats définis et individualisés. Le complexe entier des relations mutuelles créé par de telles actions concertées est appelé société. Il substitue la collaboration à l'existence isolée – au moins concevable – des individus. La société est division du travail et combinaison du travail. Dans sa fonction d'animal agissant l'homme devient un animal social.(3).Certains individus sont toutefois plus entrepreneuriaux que d'autres et exercent dès lors une influence plus importante. La praxéologie misesienne met donc l'emphase sur les processus du marché plutôt que sur un concept abstrait comme l'équilibre général. Mises ne se contente pas de décrire des phénomènes économiques tels que les prix, les salaires, les taux d'intérêt, la monnaie et les cycles économiques comme des choses existant par elles-mêmes sur lesquelles nous n'avons que peu de contrôle, car il les explique comme le résultat d'innombrables actions d'individus cherchant au meilleur de leurs connaissances à améliorer leur sort. L'influence contemporaine de L'Action Humaine Bien que L'Action Humaine ait toujours été un succès de librairie, son influence dans le monde de l'économie académique n'a jamais été très grande. Certains économistes connus, comme John Kenneth Galbraith et Paul Samuelson, l'ont totalement discrédité lors de sa parution et les plus célèbres porte-étendards de la profession de la dernière génération ne sont sans doute même pas au fait de son existence. Son étude sérieuse est aujourd'hui limité à un petit noyau d'universitaires issus de différentes disciplines ayant un intérêt marqué pour la tradition économique autrichienne et l'étude de la coopération sociale(4). L'Action Humaine est toutefois un ouvrage qui transcende les modes académiques et il y a fort à parier que son influence la plus importante est encore à venir, car aussi bizarre que les positions idéologiques de son auteur puisse paraître au premier abord, elles sont toutefois beaucoup plus réalistes et convaincantes que ce qui se fait aujourd'hui dans les départements d'économie. 1. Ludwig von Mises, L'action humaine: Traité d'économie, Presses Universitaires de France, 1985, (couverture). >> 2. Idem, p. 98-99. >> 3. Idem, p. 151. >> 4. Voir notamment les nombreuses contributions sur Mises publiées dans les périodiques suivants: The Review of Austrian Economics, The Quarterly Journal of Austrian Economics, The Journal of Libertarian Studies. >> Notes:
Le Mises Institute a récemment
publié une édition de luxe de la première édition
de Human Action
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