DISCOURS DE GARRY BREITKREUZ
Qu'est-ce qui appartient à une personne et que le Gouvernement du
Canada ne peut lui enlever? La réponse est rien.
Pensez-vous que les Canadiens ont le droit de posséder l'antenne
parabolique qu'ils ont achetée, pour laquelle ils ont payé
des droits de douane et des taxes, et d'apprécier les programmes
télévisés pour lesquels ils paient? Pensez-vous qu'ils
ont le droit de posséder le fusil qu'ils ont acheté en toute
légalité pour tirer à la cible ou chasser? Pensez-vous
qu'ils ont le droit de posséder l'argent qu'ils cotisent au régime
de retraite d'État? Pensez-vous qu'ils ont le droit de posséder
et de vendre les produits qu'ils cultivent sur leurs propres terres? Pensez-vous
qu'ils ont, en vertu du droit fédéral canadien, le droit
d'être indemnisés pour les biens que le gouvernement leur
prend, y compris leurs propres terres?
Si vous pensez que les Canadiens ont un droit quelconque ou que ces droits
sont protégés en vertu du droit canadien, je suis désolé
de vous dire que vous vous trompez. Le gouvernement peut à n'importe
quel moment prendre aux Canadiens n'importe quel de leurs biens et personne
ne peut rien y faire. Nous, à la Chambre, sommes les seuls qui pouvons
faire quelque chose.
Voyons un peu ce que le gouvernement a pris aux Canadiens. Au fil des ans,
les Canadiens ont acheté pour 700 000 dollars, chiffre
estimatif, de satellites de radiodiffusion directe à domicile, de
services et de programmes en provenance des États-Unis, parce que
ces produits n'étaient pas disponibles au Canada. Ce sont des produits
légaux sur lesquels le gouvernement du Canada a perçu des
droits de douane et des taxes. Le gouvernement a ensuite adopté
unilatéralement une loi déclarant illégaux l'équipement,
les services et les programmes dont jouissent les Canadiens qui ont leurs
propres satellites, leur propre décodeur et leur propre télévision.
Cette année, en mai, la GRC a annoncé que des mesures de
répression seraient prises contre ces criminels canadiens. Mon collègue,
le député de Calgary-Centre, a rendu publique la directive
en question. Cette directive dit ceci:
Même si les droits de douane
et les taxes sur le matériel ou l'équipement de ce genre
ont été acquittés, les dispositions de la Loi sur
la radiocommunication restent en vigueur. La possession, l'utilisation,
la vente, et ainsi de suite, d'un tel matériel sont donc illégales.
Le fait de regarder illégalement la télévision est
passible d'une amende pouvant atteindre 5 000 $ ou d'une peine
de 12 mois de prison. Il en va de même du droit de posséder
un bien et d'en user au Canada.
En 1994, un agriculteur détenant un permis d'armes à feu
délivré par le gouvernement fédéral est allé
s'acheter une carabine, une arme à feu communément utilisée
pour la chasse et des activités sportives, auprès d'un marchand
d'armes à feu titulaire d'un permis délivré lui aussi
par le gouvernement. En 1995, le gouvernement a adopté le projet
de loi C-68 qui lui confère le pouvoir absolu d'interdire toute
arme à feu si, de l'avis du gouverneur en conseil, en fait le ou
la ministre de la Justice, pense que l'arme à feu ne devrait ou
ne pourrait pas être utilisée pour la chasse et des activités
sportives. (...)
Le gouvernement peut interdire toute carabine sans tenir de débat
à la Chambre. Et il n'y a pas moyen d'amener le Parlement à
reconsidérer cette interdiction. Le gouvernement peut interdire
n'importe quelle carabine vu l'absence de toute disposition législative
qui permettrait aux propriétaires de ces armes à feu de faire
appel, et ce, pour la bonne raison que le Code criminel ne prévoit
pas un tel droit d'appel. Le gouvernement peut bien interdire les petites
carabines et affirmer que leurs propriétaires n'ont droit à
aucune compensation, que ce soit pour la perte de valeur causée
par cette interdiction arbitraire ou pour la confiscation de l'arme, le
cas échéant. (...)
Un agriculteur de la Saskatchewan, David Bryan, a fait pousser du blé
sur sa terre. Ses problèmes ont débuté lorsqu'il a
cherché à obtenir pour son blé un meilleur prix que
celui qu'était prête à lui verser la Commission canadienne
du blé. Le gouvernement fédéral a accusé M.
Bryan d'avoir exporté ses propres céréales
aux États-Unis sans avoir au préalable obtenu un permis d'exportation
de la commission, qui est un monopole et une dictature.
Pour avoir contrevenu à ce décret de tendance soviétique,
M. Bryan a passé une semaine en prison, puis s'est
vu imposer une amende de 9 000 $ et une condamnation avec
sursis de deux ans. Avec l'aide de la National Citizens' Coalition,
M. Bryan a interjeté appel de sa condamnation pour
le motif que celle-ci allait à l'encontre du droit de propriété
que lui garantit la Déclaration canadienne des droits adoptée
par le Parlement en 1960.
Le 4 février 1999, la Cour d'appel du Manitoba a décrété
que M. David Bryan n'avait pas le droit de vendre les céréales
cultivées sur ses propres terres. À la page 14 de la décision,
la Cour d'appel du Manitoba précise que:
Le paragraphe 1a) de la Déclaration
canadienne des droits, qui protège les droits de propriété
dans le cadre d'une disposition prévoyant l'« application
régulière de la loi », ne trouve pas son
parallèle dans la Charte, et le droit à la «
jouissance d'un bien » ne constitue pas un élément
fondamental de la société canadienne qui est protégé
par la Constitution.
Quiconque suit le présent débat ou en lit le compte rendu
peut-il croire que ces propos sont attribuables à un tribunal canadien?
Cette décision confirme ce que soutenait le spécialiste constitutionnel
Peter Hogg dans son livre intitulé Constitutional Law of Canada,
troisième édition:
La portée de l'article 7 (de
la Charte) est grandement réduite du fait que l'on a omis d'y inclure
les droits de propriété. C'est donc dire que l'article 7
ne prévoit aucune garantie d'indemnisation ou même d'adoption
d'une procédure équitable dans une situation où le
gouvernement s'empare de biens. Cela signifie que l'article 7 ne donne
aucune garantie d'un traitement équitable de la part des tribunaux
ou des fonctionnaires qui exercent des pouvoirs sur les intérêts
purement économiques de particuliers ou de sociétés.
Cette citation vient du paragraphe 44.9, à la page 1030. Le professeur
Hogg ajoute:
C'est donc dire qu'à l'article
7 le mot liberté doit être interprété comme
n'incluant ni les biens ni la liberté de passer des marchés,
bref, comme n'incluant pas la liberté économique.
Cette citation vient de l'alinéa 44.7b), à la page 1028.
Aussi, en l'absence de toute protection du droit de propriété
et de la liberté contractuelle dans la Charte canadienne des droits
et libertés et étant donné que les tribunaux ont décidé
que la Déclaration canadienne des droits n'offre aucune protection
contre la décision du gouvernement fédéral de s'emparer
arbitrairement de biens ou d'empiéter sur notre liberté économique
fondamentale, j'ai décidé qu'il était temps d'agir
à ce sujet.
Il est extrêmement complexe de modifier la Charte canadienne des
droits et libertés, car cela exige l'adoption d'une résolution
à la Chambre des communes et aux assemblées législatives
de sept provinces représentant environ 50 p. 100 de la population.
J'ai décidé de rédiger un projet de loi pour renforcer
la protection du droit de propriété dans la Déclaration
canadienne des droits. En conséquence, cela ne ferait que renforcer
la protection du droit de propriété dans la législation
fédérale. (...)
Je voudrais rappeler une ou deux autres choses pour récapituler.
À quoi peut bien servir le droit à la propriété?
Je vois trois grandes raisons de l'utilité et de la nécessité
du droit de propriété. Premièrement, il bonifie la
société dans laquelle nous vivons. Deuxièmement, il
protège la liberté de l'individu. Troisièmement, il
protège l'environnement. En principe, la protection du droit à
la propriété bonifie la société en ce qu'elle
encourage l'individu, au moyen de l'effort de création, à
améliorer sa qualité de vie. Ensuite, le droit à la
propriété protège la liberté de cet individu
en ce qu'il lui permet de décider de son propre chef de l'utilisation
qu'il réservera aux biens lui appartenant, notamment le fruit de
son labeur. Enfin, le droit à la propriété protège
l'environnement en ce sens que le problème de la pollution ne tient
pas au fait que les individus se rendent coupables de polluer leur propre
environnement, mais plutôt celui des autres.
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