Montréal, 13 mai 2000  /  No 62
 
 
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COURRIER DES LECTEURS
  
LES NOUVEAUX PAUVRES
  
  
          J'aimerais ajouter deux éléments supplémentaires à propos de l'étude du Conseil canadien de développement social (CCDS) sur la pauvreté dans les villes. 
  
          Premièrement, avec la croissance du revenu réel dans le temps, la proportion du revenu consacrée à l'habillement, au logement et à l'alimentation a considérablement diminué avant d'atteindre 35% (proportion de 1992). Cette réduction fait que l'on considère aujourd'hui comme « pauvre » une personne qui dépense plus de 55% (35% + 20) de son budget pour les trois postes en question, alors que cette proportion devait atteindre un pourcentage beaucoup plus élevé dans les années 50 par exemple. Il y a donc plusieurs personnes qu'on considère comme pauvres aujourd'hui, alors que si elles avaient vécu 40 ans plus tôt, cela n'aurait pas été le cas. Avec le temps, le seuil de faible revenu ratisse de plus en plus large et ramasse de plus en plus de pauvres, pour la simple raison que le niveau de vie augmente! 
  
          Deuxièmement, l'étude du CCDS porte sur les données du début des années 90, une des pires périodes sur le plan conjoncturel depuis les années 30 au Canada. Le taux de chômage moyen fut de 10,6% durant la période couverte (1991 à 1995). Pour fin de comparaison, il se situe à 6,8% actuellement (mars 2000). 
  
Bruno Parent
prof. en économique
Cégep de Sainte-Foy
  
  

 
 
LE PLUS FROID DES MONSTRES FROIDS
  
 
Bonjour cher Québécois libre 
  
          L'article de Mme Brigitte Pellerin, votre « apprentie-philosophe iconoclaste », dans le QL no 61, intitulé La démocratie en miettes, m'a fait penser à une citation dont j'ai finalement retrouvé la source, et dont je voudrais vous faire profiter. 
          L'État, c'est le plus froid de tous les monstres froids: il ment froidement, et voici le mensonge qui rampe de sa bouche: « Moi, l'État, je suis le Peuple. »
          L'auteur de cette citation est un ... philosophe iconoclaste confirmé, Nietzsche, et la source: Ainsi parlait Zarathoustra. 
  
          Les grands esprits se rencontrent? ;-) 
  
Marc Fraser
Montréal
 
 


 
 
IDÉOLOGIES: UN DÉBAT SÉMANTIQUE
  
          La lettre de M. Lantier soulève un vrai problème (voir LES DÉFORMATIONS IDÉOLOGIQUES DU QL, Courrier des lecteurs, le QL, no 61), mais M. Martin, dans sa réponse, me parait lui donner raison trop rapidement en donnant l'impression de s'excuser d'être ce qu'il est. Heureusement, l'excellente analyse de M. Golinvaux (voir IDÉOLOGIE: LES LIBERTARIENS AU BANC DES ACCUSÉS, le QL, no 61) apporte un éclairage qui permet de mettre les choses en perspective. Son rappel des origines du mot « idéologie » et de son évolution est particulièrement bienvenu. 
  
          En effet, le débat est avant tout sémantique. Chacun peut s'y retrouver. Pour moi, un idéologue, c'est quelqu'un qui adhère à une théorie ou qui se forge une conviction sans aucun esprit critique. C'est le seul critère. On est dans le domaine de l'absolu et de la croyance. Il n'y a place ni pour le raisonnement, ni pour l'observation dans cette attitude d'esprit qui relève souvent de la paranoïa ou qui risque d'y mener. Il en découle que toute conception du monde, qu'elle soit sociale, économique, politique, philosophique, peut tomber dans le piège idéologique. Elle ne l'est pas forcément au départ. Elle ne l'est pas en soi. Il peut y avoir des idéologues chez les libéraux comme il y en a chez les socialistes purs et durs. 
  
          Le libéralisme, c'est une certaine façon d'être au monde. C'est un regard sur les choses, regard empreint de liberté et de confiance en l'homme, sa capacité d'adaptation et son sens des responsabilités. Cela ne suffit pas pour atteindre la vérité mais cela permet de mieux appréhender les choses, d'en mesurer la relativité et de corriger les erreurs. 
  
          Je me rends compte, en écrivant ces mots, que ma manière de voir est influencée par mes expériences antérieures et psychiatriques et politiques. N'est-ce pas notre cas à tous? Ce qui doit nous inciter à la modestie! 
  
          Félicitations pour votre publication. 
  
François Cloutier
  
 

 
 
PETITES RÉFLEXIONS ÉCONOMIQUES
  
          http://www.irec.net/: c'est l'adresse internet de l'Institut de recherche en économie contemporaine. Cet organisme a été créé le 29 mars 2000 et a pour objectif de réunir (et sans doute d'influencer...) les travaux de recherche économique aux niveaux de la maîtrise et du doctorat. Ses points de repère sont, comme le dit monsieur Jacques Parizeau (président du Comité de recherche), la « solidarité sociale », la « régulation économique », les « compromis de l'avenir », etc. Le nouvel Institut anticipe « une meilleure définition du rôle que doivent jouer les différents acteurs sur la scène économique tant locale que mondiale ». Voilà qui me semble plutôt présomptueux... Nous laisserons-nous ainsi « définir »? 

          L'IREC présente ainsi l'ex-ministre des Finances et ex-premier ministre: « Monsieur Jacques Parizeau est membre du conseil d'administration de l'Institut de recherche en économie contemporaine depuis sa fondation et préside son comité de recherche. Premier ministre du Québec de septembre 1994 à janvier 1996, monsieur Parizeau a su, tout au long de sa carrière, démontrer un sens politique certain et une connaissance remarquable de l'économie. »  
  
          Enfin, je ne veux pas enlever à César ce qui appartient à César mais je sais très bien, tout économiste peu réputé que je suis, que le « gros bon sens » aurait dû prévaloir dans la gestion des finances publiques du Québec. Si l'avenir du Québec n'avait pas été hypothéqué par les déficits de Bourassa et Parizeau, peut-être même que Jacques Parizeau aurait gagné son référendum en 1995. Son successeur a rétabli l'équilibre mais il n'a pas tiré les leçons de l'expérience socialo-interventionniste. Et il y a encore des économistes aujourd'hui qui croient que l'on peut réduire le chômage en pompant la masse monétaire... 

          L'IREC présente un texte de l'économiste Pierre Fortin: « L'économie du Québec depuis 1960: la moitié du retard sur l'Ontario a été comblée ». Pierre Fortin y dit que « la Révolution tranquille a marqué un tournant pour le mieux dans l'histoire économique du Québec ». Tout économiste peu réputé que je suis (je le répète, car l'académisme est souvent synonyme de vérité), son texte ne m'a pas convaincu. Sa comparaison avec l'Ontario aurait dû faire abstraction de la période où Bob Rae a été premier ministre... Pierre Fortin reconnaît d'ailleurs certaines « anomalies » dans sa comparaison. Il y a du pour et du contre dans la « révolution tranquille ». Il n'était pas nécessaire d'en arriver à une crise des finances publiques pour sortir le Québec du Moyen-Âge! 
 

Yvon Dionne
St-Damase-de-L'Islet
 
 
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