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Montréal, 10 juin 2000 / No 63 |
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par
Pierre Desrochers
Il y a maintenant plus de trois ans que je vis pour l'essentiel hors du Québec. Je ne peux toutefois m'empêcher de constater lors de chacune de mes visites au bercail que Montréal prend du mieux. La situation économique de la métropole québécoise n'est évidemment pas aussi florissante que celle de la plupart des grandes villes d'Amérique, mais la prospérité américaine semble l'avoir finalement rejointe. |
Les choses ne vont toutefois pas suffisamment bien au goût du maire
Pierre Bourque et de la ministre des Affaires municipales Louise Harel,
qui rêvent encore de fusionner les municipalités de l'île
et de créer une Le professeur Milan Dluhy de la Florida International University a ainsi comparé les coûts d'une vaste gamme de services municipaux de Dade County (comprenant le gros de la région métropolitaine de Miami) et de 24 petites municipalités avoisinantes. Sa conclusion est sans appel: les économies d'échelle n'existent que dans deux secteurs, la protection des incendies et les bibliothèques publiques. Tous les autres services, qu'il s'agisse de la police, des loisirs, des travaux publics ou de la gestion des déchets, sont le plus souvent moins coûteux dans les petites villes. Le professeur David Sjoquist de la Georgia State University a de son côté analysé les coûts d'opération de 48 régions métropolitaines du sud des États-Unis et a observé que les coûts des services sont moins élevés dans les régions comptant de nombreuses petites administrations municipales. Pour le citer: Les effets du gigantisme Le phénomène est facile à comprendre. Les économies d'échelle existent parfois dans le secteur privé parce que les entreprises sont motivées par la recherche du profit et ont tout intérêt à rationaliser leurs services pour satisfaire leur clientèle au meilleur coût. Une administration municipale est au contraire financée par une ponction fiscale n'étant aucunement reliée à la qualité de sa gestion et de ses services. Plus elle grossit, plus elle s'éloigne des citoyens et devient prisonnière de groupes d'intérêt tels les syndicats d'employés municipaux et les entrepreneurs s'étant impliqués dans la campagne des élus.
De plus, le gigantisme implique obligatoirement la multiplication des contrôles et des paliers bureaucratique. Les citoyens se sentent donc rapidement dépassés lorsqu'ils cherchent à comprendre le fonctionnement d'une grande ville et délaissent la conduite des affaires municipales. D'un autre côté, le contact avec les élus et les employés municipaux est beaucoup plus facile à maintenir dans une petite municipalité. La compétition entre plusieurs administrations municipales est également bénéfiques pour les citoyens, car ceux-ci peuvent Comme mon collègue Martin Masse l'a déjà expliqué en détail (voir MONTRÉAL: UNE ÎLE, UNE MÉGABUREAUCRATIE?, le QL, no 34), la seule véritable solution aux problèmes de Montréal est Les gens ayant vraiment à coeur l'avenir de Montréal devrait plutôt cibler le gras de l'administration municipale et l'inflexibilité du cadre législatif provincial. Comme l'ancien maire d'Indianapolis, M. Stephen Goldsmith (voir SUR L'ART DE DÉGRAISSER UNE ADMINISTRATION MUNICIPALE, le QL, no 11) l'a démontré, la chose est possible si l'on sait s'y prendre. Et l'embonpoint bureaucratique ne manque pas à Montréal, comme un rapide examen des divers départements et comités de la ville, qui ne tient pas compte des sociétés paramunicipales, le laisse entrevoir (voir Mot pour mot dans ce numéro). Au bout du compte, pour reprendre l'analogie d'un élu de banlieue, l'annexion forcée des villes de banlieue ne fera que répandre le cancer, alors que l'on devrait plutôt l'opérer à la source!
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