Montréal, le 28 mars 1998
Numéro 4
 
 

Un regard libertarien
sur l'actualité québécoise et nord-américaine
  
  numéros précédents 
  Publié tous les samedis  
 ql@quebecoislibre.org 
SOMMAIRE 
 
LE MARCHÉ LIBRE 
Le projet de stade des Expos: un autre éléphant blanc  
par Pierre Desrochers  
  
Page 2 
 
ÉDITORIAL 
Jean Charest, un sauveur qui ne réglera rien  
par Martin Masse  
  
Page 3 
 
NOUVELLES BRÈVES 
Les crédits de dépenses fédérales; la politique du livre; et le b.s. international  
  
COURRIER 
DES LECTEURS 
Brique et bouquet de l'UQÀM  
   
Page 4 
  
OPINION 
Jean Charest et les illusions du Canada anglais 
par Scott Reid  
   
Page 5 

BILLET 
Délire bureaucratique à la STCUQ 
par Brigitte Pellerin  
  
Page 6 
  
LES PRIX BÉQUILLES 
au mêmes chialeux qu'à l'habitude; au ministre Sylvain Simard; et à la Corporation Da Costa  
  
VIVE LES 
QUÉBÉCOIS LIBRES 
L'équipe de création du Titanic   
  
MOT POUR MOT 
La Fédération autonome du collégial dénonce le néolibéralisme  
  
 
 
 
 

 
LE MARCHÉ LIBRE
 
LE PROJET DE STADE 
DES EXPOS:
UN AUTRE ÉLÉPHANT BLANC
  
par Pierre Desrochers
  
           Le projet du nouveau stade de l'ineffable Claude Brochu ne posait pas jusqu'à tout récemment de menace sérieuse aux goussets des contribuables québécois. Il suffisait de voir le président des Expos jouer au golf pendant que son club établissait des records de médiocrité pour s'en convaincre. Après tout, qui était assez naïf pour croire en la sincérité d'un homme d'affaires préférant se la couler douce sous le soleil floridien alors que son ultimatum (« achetez le droit d'acheter des billets ou on s'en va! ») approchait à grands pas? Ne devrait-il pas se démener comme un diable pour courtiser les milieux d'affaires montréalais s'il croit vraiment en son projet?  
 
          Nous pouvions donc dormir sur nos deux oreilles en nous disant que nous serions bientôt libérés des inepties de Rodger Brulotte et que le rendement du Fonds de solidarité serait faible l'an prochain plutôt que désastreux. 
 
         L'arrivée de Serge Savard, Jean Coutu et Red Wilson vient toutefois changer la donne. Il est évidemment à peu près impossible que nos trois compères puissent trouver rapidement 250 millions de dollars dans le milieu d'affaires le plus mal en point d'Amérique du Nord. Leur arrivée nous fait toutefois craindre que nos politiciens n'imitent nombre d'élus municipaux nord-américains et dilapident encore une fois notre argent pour une bande de millionnaires – tant joueurs que quémandeurs professionnels de subventions – mal élevés. L'entrée en scène de nos trois mousquetaires n'a d'ailleurs pas tardé à amorcer un retournement des faiseurs d'opinion publique. Si l'on ne s'étonne pas que les journalistes sportifs profèrent les pires énormités pour défendre leur gagne-pain, on est toutefois consterné de l'appui d'un Claude Picher à une injection de fonds publics dans un projet qui bénéficiera uniquement à des intérêts privés (La Presse, 14 mars). 

Aucun effet d'entraînement réel 
  
          Qu'obtiendrait-on d'une injection de centaines de millions de dollars de nos taxes dans un nouveau stade? Selon toutes les études sérieuses, à peu près rien. Sans stade, l'argent dépensé en billets et en hot-dogs serait tout simplement dépensé ailleurs, que ce soit dans les restaurants, les cinémas, les bars, les Internationaux de tennis ou d'autres activités récréo-touristiques qui combleraient rapidement le vide laissé par 80 matchs de baseball n'intéressant plus assez de monde pour que les Expos puissent faire leurs frais. 
 
          Les fonds publics investis dans « nos amours » n'amélioreraient en rien la productivité des entreprises montréalaises ou l'état de nos rues. Bien au contraire, une taxe supplémentaire pour les maintenir artificiellement en vie ne ferait qu'augmenter le fardeau fiscal des contribuables et des entreprises, ce qui enliserait davantage l'économie montréalaise. Il est d'ailleurs tout aussi faux de croire que le nouveau stade contribuerait à relancer le centre-ville. Comme le soulignait récemment le professeur Jean-Claude Marsan (Le Devoir, 24 mars), comment un stade au centre-ville qui ne serait en activité que quelques mois par année pourrait-il avoir un effet d'entraînement plus considérable que celui du Stade olympique sur le quartier Hochelaga-Maisonneuve, qui a été pratiquement nul? 
 

Des retombées touristiques illusoires 

          On entend parfois dire que nos joueurs de balle contribuent à l'image de marque de notre ville et génèrent des retombées touristiques importantes. Il serait intéressant de savoir combien de touristes ou d'organisateurs de congrès internationaux ont choisi Milwaukee, Cleveland ou Houston de préférence à la Nouvelle-Orléans, Vancouver ou Portland au cours des dernières années. Et combien de touristes québécois ont récemment mis Pittsburgh, Saint-Louis ou Détroit sur leur itinéraire de vacances? Ce n'est toutefois pas faute d'entendre le nom de ces villes tous les soirs dans les bulletins sportifs... 
 
          Montréal a bien d'autres atouts à vendre que son club de baseball et un hypothétique stade au centre-ville pour attirer les touristes et occuper les congressistes en soirée. La ville pourrait toutefois être bien plus attirante si elle commençait à ressembler à des endroits que l'on aime visiter pour une foule d'autres raisons qu'un club sportif de deuxième ordre. Il serait bien plus sensé de baisser les taxes, d'alléger la réglementation et de créer un climat propice aux affaires pour laisser de petits SoHo apparaître un peu partout. 
 
          Qui se souvient en effet que le quartier le plus recherché de Manhattan était aussi mal en point qu'un autre quartier situé plus au nord et que l'on avait surnommé « Hell's Kitchen » il y a quelques décennies? Une foule d'artistes et de petits entrepreneurs ont depuis contribué à en faire un pôle d'attraction touristique bien supérieur aux stades des Yankees et des Mets. Et tout ce qu'il a été nécessaire de faire dans ce cas a été de les laisser retaper à leur goût de vieux immeubles délabrés. Déréglementer la construction et le zonage municipal, privatiser les services municipaux et baisser les taxes feraient beaucoup plus pour relancer le centre-ville de Montréal et attirer les touristes qu'un autre éléphant blanc que l'on a pas les moyens de se payer. 
 
 

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