Montréal, 15 avril 2000  /  No 60
 
 
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COURRIER DES LECTEURS
  
SERRER LA CEINTURE
  
Bonjour, 
  
          Félicitations pour votre Budget de l'an 1 (voir LE BUDGET DE L'AN 1 LIBERTARIEN, le QL, no 59). Je m'attends cependant à ce que vous répétiez le même exercice de serrer la ceinture – un peu –, cette fois à nos bons amis du gouvernement canadien. 
  
          Salutations, 
  
Marc Fraser
   

 
 
HLM: LA SITUATION FRANÇAISE
  
          La loi française veut désormais que 20% des logements d'une ville soient des HLM. Dans ma ville, cela signifie un accroissement de 17% à peu près de la surface de ces logements (17% à 20% de la surface construite de la ville). 
  
          Cela représente une population importante (environ 1000 personnes pour une ville de 30 000 habitants), et probablement des investissements importants en infrastructures relatives à ces HLM et à la population. 
  
          D'autre part, les populations en HLM doivent répondre à des critères de revenus, même si la plupart des personnes habitant en HLM ne correspondent pas à ces critères (copinage, et surtout: payement de surloyer). Ceci étant dit, les habitants des HLM sont consommateurs de services sociaux et médicaux: la mairie offre déjà beaucoup de « stages d'été » (ou des « jeunes » peuvent se dorer au soleil payés, pendant que les ouvriers municipaux tondent les pelouses), de vacances pour les défavorisés, de séjours à Disneyland/Paris (une journée à Disney: 300FF. Cinquante « jeunes » à Disney: 15 000FF), etc. Tout cela ne fait que renforcer le sentiment d'inégalité. Car les inégalités se renversent – les droits sont réciproques, sinon ils n'en sont pas. Ce sont des privilèges. Le sens de mon intervention est que plus il y a de personnes qui bénéficient de ce type de « droits » (des passes droit en fait), plus la rancoeur des autres est grande. 
  
          Je le vois chaque jour dans ma ville, car la situation est insupportable. À force de donner sans contrepartie, la solidarité privée, la charité n'existe plus. 
  
          D'autre part, côtoyer des personnes qui ne font rien pour mériter les faveurs dont elles sont l'objet génère le « racisme » dont parle Jonathan Carmichael (voir Courrier des lecteurs, HLM BLUES: RIDICULE, DOGMATIQUE, TRISTE, le QL, no 59). 
  
          Ce courrier m'a d'ailleurs fait sauter au plafond... Une fois encore on voit la dualité des gauchistes en général qui dénigrent ceux qui réussissent (quote: « Wow! l'objectif suprême de tout le monde est d'avoir une belle grande maison où en famille ils pourront passer de belles veillées à arroser leur asphalte ou à regarder verdir leur pelouse! Sérieux, c'est vraiment ridicule! ») mais qui dans le même temps réclament pour eux les attributs de la richesse.  
  
          Quand  à l'accusation de racisme parce que l'on ne veut pas de HLM dans son quartier, n'est-ce pas là la moindre des choses que de pouvoir choisir avec qui l'on veut habiter? Je propose à cette personne mieux que des HLM: qu'il accueille chez lui des pauvres, une famille de 6 enfants, etc. 
  
          À une époque où des immigrés clandestins occupaient une église à Paris (incident Saint Bernard), on a vu des stars pleurer sur le sort des « sans papiers ». Un journaliste (de Libé ou de VSD, je ne sais plus), s'est présenté au domicile d'Emmanuelle Béart avec un Malien, qu'elle n'a pas voulu accueillir chez elle. La solidarité, c'est bien quand c'est les autres? La solidarité privée, ça n'existe pas? 
  
          J'ai eu de grandes discussions avec des amis (et ex-amis désormais pour certains) car ils me voyaient comme « insensible au malheur des autres ». Faux! Archi-faux! Quand on paye 50% d'impôts et qu'il y a toujours autant de pauvres, c'est que l'argent ne va pas au bon endroit (cf. Brigitte Pellerin: target the poor). Il enrichit des comités d'observation de la pauvreté, des assistantes sociales (100 000 en France? Plus? On ne sait même pas!!).  
  
          Alors rendez-moi mon argent, et je ferai ma charité avec. Et si je juge que l'argent placé à la Bourse permet de financer des projets qui créeront des richesses, des emplois, etc., laissez-moi juge de cela. C'est ma façon de faire avancer la société. 
  
          Dernière remarque sur l'égalité des chances. Comme le rappelle Rothbard, souhaiter l'égalité des chances c'est comme demander aux gens de battre des bras pour atteindre la Lune. C'est impossible. Mais pas pour des raisons physiques comme semblerait dire Rothbard, mais parce que l'égalité des chances n'existe pas, tout simplement. 
  
          Allez, bonne continuation le QL, toutes mes amitiés. 
 
Hervé DURAY
 
 


 
 
CONTRE L'EXCLUSION,
POUR L'ÉDUCATION PUBLIQUE
  
          Il y a un truc qui revient dans plusieurs de vos articles: les parasites qui vivent aux crochets de la société. Vous croyez sincèrement qu'il y a de la job pour qui le veut bien? Présentement, même en période de croissance économique, notre taux de chômage demeure relativement élevé, entre 8 et 9%. Et si en plus vous forcez tous les travailleurs découragés à réintégrer le marché du travail alors c'est le taux de chômage qui va augmenter. Il n'y a tout simplement pas de job pour tout le monde. Alors pour tous les exclus du marché du travail que proposez-vous? Et pour tous ces travailleurs précaires (qui deviennent de plus en plus nombreux en raison de la flexibilité recherchée par les entreprises dans le contexte de la mondialisation) qui vivent fréquemment des périodes de chômage? 
  
          La formation, l'éducation, est bien sûr l'une des principales façons d'augmenter l'employabilité d'un individu. Lorsque vous parlez de privatiser l'éducation vous excluez d'office une large portion de la population qui n'aura tout simplement plus les moyens de se payer les études nécessaires à sa mise en valeur sur le marché du travail. L'article de Pierre Desrochers (voir LE MYTHE DES UNIVERSITÉS AMÉRICAINES INACCESSIBLES, le QL, no 59) est loin d'être convaincant! Au contraire, afin d'offrir à tous une chance égale de réussite, afin que la liberté prenne tout son sens et ne soit pas seulement la liberté de ceux qui ont les moyens de se l'offrir, l'État doit investir massivement dans l'éducation. 
  
          Le décrochage scolaire au secondaire est un problème ici au Québec. En 1999, 33,8% des jeunes ont quitté l’école secondaire sans avoir obtenu de diplôme. L'employabilité de ces jeunes est à peu près nulle. Alors, face à l'exclusion qu'ils subissent sur le marché du travail, ils risquent de réagir en rejetant à leur tour le marché du travail. Pour parvenir à intéresser ces jeunes à l'école, pour les y accrocher, pour mettre terme au cercle vicieux de la pauvreté, l'État doit intervenir et débloquer les fonds nécessaires afin d'augmenter le nombre d'enseignants et d'améliorer les services offerts aux étudiants. 
  
          L'éducation doit aussi rester libre face aux institutions ne pouvant pas être contrôlées démocratiquement. Ainsi, le privé ne doit pas y être l'acteur principal. Le savoir est en soi un profit pour la société. Alors, l'éducation ne doit pas être envisagée sous un point de vue de profit monétaire.  
  
Jonathan Carmichael
  
 
Réponse de Martin Masse:  
 
Monsieur Carmichael, 

          Vous avez raison, il n'y a pas d'équilibre actuellement entre l'offre et la demande d'emplois, pour une raison bien simple: le marché du travail est trop taxé et réglementé. Qu'est-ce que nous proposons? Simple. Pour créer des emplois, il faudrait déréglementer, en particulier abolir les lois qui protègent la mafia syndicale et qui créent une caste de travailleurs privilégiés aux dépens des autres (voir LABOR LAW SHOULD PROTECT WORKER FREEDOM INSTEAD OF UNION POWER, le QL, no 58); abolir le salaire minimum (voir IL FAUT ABOLIR LE SALAIRE MINIMUM, le QL, no 50); éliminer les taxes sur la masse salariale et l'impôt sur les profits des sociétés; enfin, privatiser l'assurance-chômage et mettre une limite de temps à l'assistance sociale de façon à augmenter les incitatifs au travail. 
  
          Pour ce qui est des écoles, quelle sorte de « contrôle démocratique » un parent a-t-il au juste sur le système public d'éducation? Aucun. Celui-ci est contrôlé par des bureaucrates à Québec qui appliquent les mêmes règles, programmes et méthodes pédagogiques partout. De décennie en décennie, les modes pédagogiques changent et on chambarde tout. Et 40 ans après l'étatisation des écoles, un tiers des élèves ne finissent toujours pas leur secondaire, comme vous écrivez, et une bonne partie de ceux qui obtiennent leur diplôme ne savent pas vraiment écrire ni compter.  
  
          Vous en concluez de façon prévisible, comme tous les étatistes, qu'il faut donner plus d'argent et de pouvoir à l'État dans ce domaine pour lui permettre d'en faire plus. Mais l'État a manifestement échoué, comme il échoue dans tout ce qu'il touche. Nous croyons au contraire que ce sont les parents qui devraient être responsables de l'éducation de leurs enfants et qui devraient pouvoir faire les choix nécessaires dans un marché privé d'éducation. 
  
          Vous dites aussi que l'éducation doit rester libre: comment pouvez-vous alors accepter qu'il n'y ait qu'UN SEUL modèle, UN SEUL administrateur, UN SEUL pouvoir, dans le monde de l'éducation, l'État? N'est-ce pas un peu absurde? Nous croyons au contraire qu'il devrait y avoir une variété de modèles, de philosophies d'enseignement, de milieux adaptés pour des enfants avec des besoins et aptitudes différents, ce qui garantira la liberté de choix.  
  
          Le fait que l'éducation soit un « profit pour la société » ne veut strictement rien dire. Tout peut être collectivisé abstraitement de cette façon. Vous pouvez considérer aussi la bonne alimentation d'une population comme un bien collectif, ce qui ne signifie aucunement qu'il faille étatiser tous les supermarchés. La meilleure façon d'avoir un système d'éducation efficace est au contraire de considérer l'enseignement comme un service comme les autres, et de faire en sorte que la satisfaction du client (le parent) détermine qui fera des profits, qui devra se réajuster et qui fera faillite. Dans ce contexte, les fournisseurs de service (les écoles) auront intérêt à devenir meilleurs et à se préoccuper de la réussite des élèves, tout comme n'importe quel autre type d'entreprise. Au lieu de cela, aujourd'hui, le personnel éducatif est plus préoccupé de se servir lui-même à même les fonds publics et d'appliquer des conventions collectives absurdes imposées par la mafia syndicale. 
  
M. M. 

 
 
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