Montréal, 28 septembre 2002  /  No 110  
 
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Martin Masse est directeur du QL. La page du directeur.
 
MOT POUR MOT
 
QUE LE VÉRITABLE LIBÉRAL SE LÈVE (III)
  
 
          Des élections générales doivent avoir lieu au Québec d’ici l’automne 2003. Le Parti québécois (PQ), au pouvoir depuis 1994, est voué à la défaite. Les deux principaux partis d’opposition, le Parti libéral (PLQ) et l’Action démocratique (ADQ), prétendent vouloir réduire le rôle et la taille de l’État provincial. L’un des deux formera vraisemblablement le prochain gouvernement.  
    
          Pour permettre à nos lecteurs de se faire une idée sur l’évolution de leurs positions (les politiciens sont des girouettes...), nous rapporterons régulièrement jusqu’au scrutin les propos de nature libérale ou étatiste des deux chefs et de leurs lieutenants, ainsi que les résultats des derniers sondages. 
  
          Que le véritable libéral (s’il y en a un) se lève... et l’emporte! 
  
M. M.
 
Jean Charest 
Parti libéral du Québec
Mario Dumont 
Action démocratique du Québec
  
  
Les libéraux se sont prononcés. À près de 300 jours de l'échéance électorale, Jean Charest a rendu public son « plan d'action du prochain gouvernement libéral », prônant des baisses d'impôt de cinq milliards $, tout en réinjectant un peu moins de huit milliards $ en santé et en éducation. « Les Québécois veulent connaître les intentions de ceux qui aspirent à gouverner. J'espère que les autres (partis) en feront autant », a dit celui qui prend ainsi le risque de mettre ses cartes sur la table. Ses cartes, les voici: 6,23 milliards $ de plus sur six ans en santé, ce qui ferait passer le budget du ministère à 23,68 milliards $ en 2008-2009, une hausse de 35%. Augmentation aussi en éducation, même si elle est moindre: 1,65 milliard $ ou 15% sur six ans pour atteindre un budget de 12,79 milliards $. 
  
En même temps que ces hausses de dépenses, les libéraux entendent consentir des baisses d'impôt d'un milliard $ par année aux Québécois pendant cinq ans, pour une diminution moyenne totale de 27%. Pour réussir à maintenir le déficit zéro, les libéraux décréteraient un gel des budgets de tous les autres ministères pendant cinq ans. Compte tenu de l'inflation anticipée, ce gel équivaut à des compressions de 10,5% du budget de l'ensemble des autres ministères. Actuellement, « l'État québécois est lourd et tentaculaire », déplorent les libéraux, qui veulent le recentrer sur la santé, le savoir, la prospérité et la sécurité. 
  
(Source: Le Soleil, 13 septembre) 
  
  
Mario Dumont n'a pas été impressionné par la sortie du programme libéral, qui s'avance sur des dépenses gouvernementales jusqu'à 2009. Trop loin dans le temps, dit-il. Et il refuse de s'engager actuellement, même pour les deux prochaines années. En attendant, les Québécois sauront seulement que l'ADQ entend baisser les impôts de façon significative « pour arrêter d'être en dehors des créneaux normaux d'Amérique du Nord ». Plus tôt dans la journée, les libéraux promettaient que « le fardeau fiscal (des Québécois) sera égal ou inférieur à la moyenne canadienne ». « L'idée qu'il faut baisser les impôts et mettre des chiffres, c'est comme la partie facile de l'opération. La partie difficile de l'opération, c'est de dire comment on va dégager la marge de manoeuvre », dit encore Mario Dumont. 
  
Sur le fond du programme libéral, M. Dumont soutient qu'il s'agit de la poursuite des positions du PQ. Pour lui, pas question de remettre des milliards $ en santé. L'amélioration du système ne passe pas par « des ajouts et des ajouts et des ajouts d'argent en matière de santé. C'est ce que le Parti québécois a essayé, c'est ce que le Parti libéral nous dit être sa solution miracle, mais c'est la même chose que le PQ. Nous, on ne partage pas cette direction-là. » Et le chef adéquiste de poursuivre: « Il faut changer de façon un peu plus sérieuse les bases de notre système de santé. » 
  
(Source: Le Soleil, 13 septembre) 
  
  
L'entrée du secteur privé dans les soins de santé au Québec n'est pas une panacée, prévient le chef libéral Jean Charest. S'il est élu le PLQ aura recours au secteur privé, mais dans la mesure où il répond aux besoins du secteur public. Dans sa plate-forme électorale, le PLQ propose de recourir aux cliniques privées et spécialisées afin de réduire les listes d'attente. Mais que ce soit pour « des hanches ou des cataractes » ces cliniques privées devront intervenir « en lien avec un hôpital ». Les médecins des cliniques privées devront prouver qu'ainsi on réduit les listes d'attente, a expliqué hier M. Charest. 
  
Pas question donc de système « à deux vitesses », selon le chef libéral. Dans les propositions du PLQ, les cliniques privées pourraient faire des interventions chirurgicales, mais elles resteront employées d'un établissement de santé et le citoyen n'aura rien à débourser pour s'y faire soigner. Pour ce qui est de l'administration du système, pas de problèmes. « Ce qui ne touche pas au médical, on peut s'ouvrir au privé: pour la gestion d'un hôpital, les services de buanderie ou de cafétéria », a donné en exemple le chef libéral. 
  
     « Ce qui ne touche pas au médical, on peut s'ouvrir au privé: pour la gestion d'un hôpital, les services de buanderie ou de cafétéria. » 
- Jean Charest - 
  
[...] Pour Jean Charest, la proposition d'un système de santé privé coexistant avec le système public est inacceptable et il est faux de penser que les deux régimes peuvent fonctionner parallèlement sans que le privé nuise au public. 
  
« Les gens sont les grands perdants » quand on ouvre deux voies, l'une privée, l'autre publique. Les médecins, c'est prévisible ont tôt fait de passer au secteur privé, plus lucratif. Ces départs augmenteraient encore les pénuries de médecins et d'infirmières. « Vous allez élargir le fossé entre la prestation de services pour les gens ordinaires et les nantis. » De plus, si vous payez davantage dans le privé, « vous mettez de la pression sur le secteur public ». 
  
(Source: La Presse, 17 septembre) 
  
  
Même si l'ADQ « a un agenda économique davantage de droite que ce que le Québec a connu depuis quelques années, il n'y a pas de courant de droite morale qui voudrait que les assistés sociaux déménagent à l'extérieur, il n'y a pas de ça chez nous. On a beaucoup de compassion [...] Les programmes temporaires, les fonds de lutte contre la pauvreté, les gens commencent à être pas mal écoeurés de ça, on veut des vrais jobs en bout de ligne... » 
  
« Là où on est plus à droite, c'est que l'on ne croit pas que la réponse à la compassion se fait à partir de grands modèles étatiques. Je rejette totalement l'idée que si c'est privé, c'est mauvais. Le médecin de la clinique privée vous soigne avec la même intégrité que celui de l'hôpital, le professeur du privé prend autant à coeur la réussite des élèves. Comme si parce que c'était privé, cela ne fait plus partie du patrimoine québécois », soutient le jeune politicien.  
  
« Le service au public peut être offert par le privé plus efficacement que par l'État, à la limite la collectivité peut même ramasser la facture... Si le privé offre les services à 25% de moins que le public et ne garde que 2% de profit, je m'excuse, c'est un gain net pour la population », dit M. Dumont.  
  
(Source: La Presse, 14 septembre) 
  
  
Jean Charest promet aux régions un Québec où la « taille unique » ne sera plus la norme. La semaine dernière, les libéraux ont surpris en proposant une décentralisation très audacieuse des décisions, des responsabilités actuellement assumées par le gouvernement du Québec. 
  
Mais bien des questions restent à préciser toutefois dans le programme du PLQ après le « constat de base que le gouvernement du Québec est très centralisateur » 
  
Le PLQ propose d'entreprendre des discussions avec les municipalités et les MRC « afin de leur déléguer des responsabilités qu'elles désirent et les ressources qui les accompagnent ». À deux conditions, précisait hier M. Charest: les élus locaux devront être imputables de leurs décisions, et ne pas ajouter de structures à celles qui existent déjà. « Cela peut inclure le transport, le tourisme, le développement économique, tout ce qui est service de proximité », précise M. Charest. Si les libéraux obtenaient un mandat clair, le gouvernement pourrait bouger assez rapidement dans cette direction, prédit-il. 
  
Le financement de cette opération reste à préciser. Jean Charest suggère qu'une partie de la TVQ pourrait être aiguillée vers les pouvoirs locaux. Des ententes de cinq ans pourraient être mises en place, mais chaque année, les régions feraient rapport à une commission de l'Assemblée nationale. « Cela permettrait même d'avoir une saine émulation, on pourrait comparer d'une région à l'autre, voir comment les décideurs tirent leur épingle du jeu », a précisé M. Charest. 
  
Il faut prévoir que les régions voudront s'occuper de secteurs différents, mais pour Jean Charest cela n'entraînera pas de contradiction, de cacophonie dans le développement régional. Les ententes conclues avec les villes et les MRC « permettront de s'assurer qu'il y a concordance dans les politiques », prédit-il. S'il y a des problèmes particuliers, « on fera des ententes au cas par cas ». Mais la ligne sera partout la même, les élus locaux qui veulent avoir plus de responsabilités se verront confier par Québec les moyens de les assumer. 
  
(Source: La Presse, 17 septembre) 
  
  
Mario Dumont considère que les libéraux, qui promettent eux aussi une révision du rôle et de la taille de l'État québécois, ne sont pas crédibles en la matière puisqu'ils étaient au pouvoir lorsqu'ont été déposés – puis tablettés – les rapports Scowen, Gobeil et Poulin, qui portaient tous sur ce sujet. 
  
« Des gens qui y ont pensé, il y en a déjà pas mal, a-t-il ironisé. Ce qu'on a besoin, c'est des gens qui vont le faire, et nous, on va être de cette école-là. [...] C'est nos convictions, on a fondé un parti pour aller dans cette direction-là, et ça va être la même chose avant, pendant et après les élections. » 
  
     « Je rejette totalement l'idée que si c'est privé, c'est mauvais. Le médecin de la clinique privée vous soigne avec la même intégrité que celui de l'hôpital. » 
- Mario Dumont - 
 
Le chef adéquiste a assuré, lors de son allocution devant les jeunes gens d'affaires, que « la grosse prospérité, une économie qui roule à 110%, est la seule façon pour une génération moins nombreuse de pouvoir soutenir les services de santé et les services sociaux qui vont aller en grandissant avec le vieillissement de la population ». 
  
Pour y arriver, a-t-il avancé, « on n'a pas à réinventer le Québec, il faut libérer le talent, l'énergie et l'initiative qui existent. La plus belle chose qu'un gouvernement moderne, flexible et dynamique peut offrir, c'est d'être un gouvernement qui ne sera plus un obstacle et qui ne mettra plus de bâtons dans les roues » 
  
(Source: Le Devoir, 20 septembre) 
  
  
Un gouvernement libéral ne remplacera pas tous les employés de la fonction publique qui prendront leur retraite au cours de la prochaine décennie. « Nous ne croyons pas qu'il sera nécessaire de remplacer les 40% d'employés – 21 000 personnes – qui vont prendre leur retraite au cours des prochaines années », a déclaré M. Charest sans toutefois s'avancer sur la taille de la fonction publique sous un gouvernement libéral. Selon les données les plus récentes du secrétariat du Conseil du Trésor, l'effectif actuel des ministères et organismes compte un peu plus de 78 000 personnes, soit près de 16 000 de plus qu'en mars 1998. 
  
Il est clair, pour Jean Charest, que la redéfinition du rôle de l'État, notamment avec l'implantation d'un gouvernement en ligne en mesure d'offrir des services 24 heures par jour, sept jours par semaine et un nouveau partage des responsabilités avec les régions, va se faire « avec moins de monde » qu'il y en a actuellement. Cela dit, Jean Charest ne ferme pas la porte au rajeunissement de la fonction publique. « Il va y avoir de la place pour l'embauche. » Et il compte bien rendre l'appareil gouvernemental plus séduisant pour la jeune génération qui fait l'objet de convoitise de la part du secteur privé et du gouvernement fédéral, entre autres. 
  
S'il dit ne pas vouloir « bousculer » le monde de la fonction publique, Jean Charest est déterminé à réduire le nombre de ministères, à « geler » les budgets – sauf ceux de la santé et de l'éducation – forçant ainsi les autorités à faire des choix et à faire une place importante au secteur privé. Quels ministères ou quels organismes disparaîtront? Le chef libéral est prudent. « On va y aller dans le cas par cas ». Il suggère de confier l'examen en profondeur de la mission des ministères, des organismes et des sociétés d'État – afin d'en réduire le nombre – à une commission parlementaire de l'Assemblée nationale. 
  
(Source: Le Soleil, 19 septembre) 
  
  
Le chef de l'ADQ répète qu'il souhaite éliminer de nombreux étages séparant les ministres des fonctionnaires sur le terrain et en bout de ligne des services à la population. Mais, contrairement au chef libéral Jean Charest, Mario Dumont ne croit pas qu'une nouvelle commission parlementaire pourrait indiquer la marche à suivre dans la réduction de l'État québécois. 
  
« On a un certain modèle de gouvernement en tête, une certaine façon de le gérer. Le gouvernement va être moins gros, plus branché direct sur les services aux citoyens », indique-t-il.  
  
Il promet d'en faire plutôt un enjeu électoral et, s'il est élu, l'ADQ aura le feu vert pour supprimer les structures inutiles. « Domaine par domaine, autant l'aplanissement des structures que la réduction du nombre d'organismes, les gens qui seront nommés à la tête des ministères auront le mandat de faire ce travail », dit-il. 
  
Lors de la campagne électorale de 1998, l'ADQ avait parlé d'une réduction de près du quart des effectifs de l'État. Les ministères et organismes québécois emploient maintenant près de 80 000 personnes. 
  
Cependant, Mario Dumont refuse aujourd'hui de s'avancer sur de nouveaux chiffres. L'ADQ, dit-il vaguement, veut éliminer « toutes les structures qui étudient, qui conseillent et qui font du papier » 
  
(Source: La Presse, 20 septembre) 
 
 
La fiscalité des entreprises est un enchevêtrement de programmes d'aide, de subventions et de crédits d'impôt. Il en résulte un fouillis administratif et des iniquités. Ces programmes favorisent-ils l'investissement privé au Québec? Non. Le Québec ne reçoit que 17,7% des investissements effectués par les entreprises au Canada. 
  
Dès la première année de son premier mandat, un gouvernement du Parti libéral du Québec révisera tous les programmes d'aide et de crédits d'impôt et éliminera ceux qui sont inefficaces. Nous réduirons d'autant les taxes qui nuisent directement à l'investissement et à la création d'emplois. Cette révision rendra la fiscalité des entreprises plus simple et plus équitable. Les PME seront les premières à bénéficier d'un allègement fiscal. D'autre part, nous continuerons de soutenir les secteurs où une intervention de l'État est utile et nécessaire, notamment en matière d'innovation. 
  
(Source: Plan d'action du prochain gouvernement libéral, 12 septembre) 
  
  
Un gouvernement dirigé par Mario Dumont réduirait la paperasserie et les tracasseries administratives que l'État fait peser sur les PME et qui, dit-il, nuisent à leur potentiel de création d'emplois. 

Selon M. Dumont, présentement, un peu plus de trois heures par employé et par semaine sont consacrées dans les PME à la réponse aux demandes administratives gouvernementales et à la rédaction de rapports de toutes sortes « au lieu de se consacrer à faire avancer l'entreprise », a-t-il souligné en rappelant que les PME sont responsables de la création de 80 pour cent des nouveaux emplois. 

« Une PME a besoin d'une moyenne de 26 autorisations et permis de toutes sortes du gouvernement pour fonctionner à chaque année. Le minimum est de 13 permis et certaines en ont jusqu'à 49... Ces entreprises font affaires avec trois ministères différents. Les entreprises commerciales, elles, doivent répondre aux demandes de six organismes et ministères différents », a-t-il déclaré. 

Sur sa lancée, il a fait part de l'enquête de la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante qui détermine que les six premiers problèmes auxquels sont confrontées les PME relèvent du gouvernement. Le septième problème est l'accès au crédit. 

Pour M. Dumont, il ne fait donc pas de doute que l'État doit réduire sa gloutonnerie en matière de rapports et de réglementations et « laissez les PME se concentrer sur leur travail et créer des emplois ». 
  
(Source: La Tribune, 25 septembre) 
 

  
  

  
  
Sondages 
 
Léger Marketing-Le Devoir-TVA-Globe and Mail 
5 septembre 2002 (après répartition des indécis) 
  
PQ:
25%
PLQ:
29%
ADQ:
40%
 
  
  
  
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